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se groupent derrière ce bouquet de pins, comme des mouches qui se rassemblent autour de leur reine. Sur mon âme, un enfant serait sûr de placer une balle au milieu de cet essaim de corps amoncelés.

Dans ce moment Chingachgook donna le signal ; sa troupe fit feu, et une douzaine de Hurons tombèrent morts. Au cri de guerre qu’il avait poussé répondirent des acclamations parties de la forêt ; et alors un cri si perçant retentit dans les airs, qu’on eût dit que mille bouches s’étaient réunies pour le faire entendre. Les Hurons consternés abandonnèrent le centre de leur ligne, et Uncas sortit de la forêt par le passage qu’ils laissaient libre, à la tête de plus de cent guerriers.

Agitant ses mains à droite et à gauche, le jeune chef montra l’ennemi à ses compagnons, qui se mirent aussitôt à sa poursuite. Le combat se trouva alors divisé. Les deux ailes des Hurons qui se trouvaient rompues rentrèrent dans les bois pour y chercher un abri, et elles furent suivies de près par les enfants victorieux des Lenapes. À peine une minute s’était écoulée que déjà le bruit s’éloignait dans différentes directions, et devenait moins distinct à mesure que les combattants s’enfonçaient dans la forêt. Cependant un petit noyau de Hurons s’était formé, qui, dédaignant de prendre ouvertement la fuite, se retiraient lentement comme des lions aux abois, et montaient la colline que Chingachgook et sa troupe venaient d’abandonner pour prendre part de plus près au combat. Magua se faisait remarquer au milieu d’eux par son maintien fier et sauvage, et par l’air impérieux qu’il conservait encore.

Dans son empressement à mettre tous ses compagnons à la poursuite des fuyards, Uncas était resté presque seul ; mais du moment que ses yeux eurent aperçu le Renard-Subtil, il oublia toute autre considération. Poussant son cri de guerre, qui ramena autour de lui cinq ou six de ses guerriers, et sans faire attention à l’inégalité du nombre, il se précipita sur son ennemi. Magua, qui épiait tous ses mouvements, s’arrêta pour l’attendre, et déjà son âme féroce tressaillait de joie de voir le jeune héros, dans son impétuosité téméraire, venir se livrer à ses coups, lorsque de nouveaux cris retentirent, et la Longue-Carabine parut tout à coup à la tête d’une troupe de blancs. Le Huron tourna le dos et se mit à battre en retraite sur la colline.

Uncas s’aperçut à peine de la présence de ses amis, tant il était