Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 5, 1839.djvu/396

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était dans une grande inquiétude de ne pas apercevoir la plus légère trace de ses ennemis.

Une ou deux fois il fut tenté de donner le signal de l’attaque, et de chercher à prendre le village par surprise ; mais son expérience lui faisait sentir au même instant le danger d’une tentative aussi incertaine. Alors il écoutait de toutes ses oreilles, dans une pénible attente, s’il n’entendait pas quelque bruit hostile partir de l’endroit où Uncas était resté ; mais il n’entendait que les sifflements du vent qui commençait à balayer tout ce qu’il rencontrait dans les cavités de la forêt, et présageait une tempête. À la fin, las de ne prendre conseil que de la prudence, ne consultant plus qu’une impatience qui ne lui était pas naturelle, il résolut d’agir sans tarder davantage.

Le chasseur s’était arrêté derrière un buisson pour faire ses observations, tandis que ses guerriers étaient restés cachés près du lit de la rivière. En entendant le signal que leur chef donna à voix basse, ils remontèrent sur les bords en se glissant furtivement comme autant de spectres lugubres, et ils se groupèrent en silence autour de lui. Œil-de-Faucon leur indiqua du doigt la direction qu’ils devaient suivre, et il s’avança à leur tête. Toute la troupe se forma sur une seule ligne, et marcha si exactement sur ses pas, qu’à l’exception d’Heyward et de David on ne voyait que la trace des pas d’un seul homme.

À peine s’étaient-ils montrés à découvert, qu’une décharge d’une douzaine de fusils se fit entendre derrière eux, et un Delaware, sautant en l’air comme un daim atteint par la balle d’un chasseur, retomba lourdement à terre et y resta dans l’immobilité de la mort.

— Ah ! je craignais quelque diablerie de ce genre ! s’écria le chasseur en anglais ; puis, avec la rapidité de la pensée, il ajouta dans la langue des Delawares : — Vite à couvert, et chargez !

À ces mots la troupe se dispersa, et avant qu’Heyward fût revenu de sa surprise, il se trouva seul avec David. Heureusement les Hurons s’étaient déjà repliés en arrière, et pour le moment il n’avait rien à craindre. Mais cette trêve ne devait pas être de longue durée ; le chasseur reparut aussitôt, donna l’exemple de les poursuivre en déchargeant son fusil, et courut d’arbre en arbre, chargeant et tirant tour à tour tandis que l’ennemi reculait lentement.

Il paraîtrait que cette attaque soudaine avait été faite par un très petit détachement de Hurons ; mais à mesure qu’ils se reti-