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— A-t-il donc beaucoup de pratique dans l’art de la psalmodie ? lui demanda son compagnon avec simplicité.

Alice éprouvait une grande disposition à partir d’un éclat de rire, mais elle eut assez d’empire sur elle-même pour réprimer ce signe extérieur de gaieté.

— Je crains, répondit-elle, qu’il n’ait un goût plus décidé pour les chants profanes. La vie d’un soldat, les chances auxquelles il est exposé, les travaux continuels auxquels il se livre, ne sont pas propres à lui donner un caractère rassis.

— La voix est donnée à l’homme, comme ses autres talents, pour qu’il en use, et non pour qu’il en abuse, répliqua gravement son compagnon. Personne ne peut me reprocher d’avoir jamais négligé les dons que j’ai reçus du ciel. Ma jeunesse, comme celle du roi David, a été entièrement consacrée à la musique ; mais je rends grâces à Dieu de ce que jamais une syllabe de vers profanes n’a souillé mes lèvres.

— Vos études se sont donc bornées au chant sacré ?

— Précisément. De même que les psaumes de David offrent des beautés qu’on ne trouve dans aucune autre langue, ainsi la mélodie qui y a été adaptée est au-dessus de toute harmonie profane. J’ai le bonheur de pouvoir dire que ma bouche n’exprime que les désirs et les pensées du roi d’Israël lui-même, car quoique le temps et les circonstances puissent exiger quelques légers changements, la traduction dont nous nous servons dans les colonies de la Nouvelle-Angleterre l’emporte tellement sur toutes les autres par sa richesse, son exactitude et sa simplicité spirituelle, qu’elle approche autant qu’il est possible du grand ouvrage de l’auteur inspiré. Jamais je ne marche, jamais je ne séjourne, jamais je ne me couche sans avoir avec moi un exemplaire de ce livre divin. Le voici. C’est la vingt-sixième édition, publiée à Boston, anno Domini 1744, et intitulée : « Psaumes, Hymnes et Cantiques spirituels de l’Ancien et du Nouveau-Testament, fidèlement traduits en vers anglais pour l’usage, l’édification et la consolation des saints en public et en particulier, et spécialement dans la Nouvelle-Angleterre. »

Pendant qu’il prononçait l’éloge de cette production des poètes de son pays, le psalmodiste tirait de sa poche le livre dont il parlait, et ayant affermi sur son nez une paire de lunettes montées en fer, il ouvrit le volume avec un air de vénération solen-