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permis à Duncan d’y jeter un coup d’œil, ses regards rencontraient partout sous l’herbe des yeux noirs et vifs constamment fixés sur lui.

La curiosité des enfants fut pour le major un présage qui ne lui parut pas encourageant, et pendant un moment il aurait volontiers battu en retraite. Mais il était trop tard même pour avoir l’air d’hésiter. Les clameurs bruyantes des enfants avaient attiré une douzaine de guerriers à la porte de la hutte la plus voisine, où ils étaient assemblés en groupe, attendant gravement que ceux qui arrivaient si inopinément s’approchassent d’eux.

David, déjà un peu familiarisé avec de pareilles scènes, marchait le premier, en droite ligne, d’un pas ferme qu’il aurait fallu un obstacle peu ordinaire pour déranger, et il entra dans la hutte avec un air d’assurance et de tranquillité : c’était le principal et le plus grand édifice de cette espèce de village, quoiqu’il ne fût pas construit avec plus de soin ou avec d’autres matériaux que les autres. En ce local se tenaient les conseils et les assemblées publiques de la peuplade, pendant sa résidence temporaire sur les frontières, de la province anglaise.

Duncan trouva quelque difficulté à prendre l’air d’indifférence qui lui était nécessaire quand il passa entre les sauvages robustes et gigantesques qui étaient attroupés à la porte ; mais, songeant que sa vie dépendait de sa présence d’esprit, il imita son compagnon, qu’il suivait pas à pas, et s’efforça tout en s’avançant de rallier ses idées. Un instant son cœur avait cessé de battre quand il s’était trouvé en si proche contact avec des ennemis féroces et implacables ; mais il parvint à maîtriser son émotion, et marcha jusqu’au centre de la cabane sans donner aucun signe de faiblesse. Suivant l’exemple de David, il s’avança vers une pile de fagots de branches odorantes qui étaient dans un coin de la hutte, en prit un, et s’assit en silence.

Dès que le nouveau venu fut entré, ceux des sauvages qui étaient sortis de la hutte y rentrèrent sur-le-champ, et se rangeant autour de lui, ils semblèrent attendre avec patience que la dignité de l’étranger lui permît de parler. D’autres étaient appuyés avec une sorte d’indolence sur les troncs d’arbres qui servaient de piliers pour soutenir cet édifice presque chancelant. Trois ou quatre des plus âgés et des plus renommés de leurs guerriers s’étaient assis, suivant leur usage, un peu en avant des autres.