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pas, et avec la même confiance que des voyageurs qui auraient suivi une grande route. Si un rocher, un ruisseau, un terrain plus dur que de coutume interrompaient la chaîne des traces qu’ils suivaient, les yeux exercés du chasseur ou des deux Mohicans les retrouvaient à peu de distance, et rarement ils étaient obligés de s’arrêter un instant. D’ailleurs, leur marche était plus assurée par la certitude qu’ils venaient d’acquérir que Magua avait jugé à propos de voyager à travers les vallées, circonstance qui ne leur laissait aucun doute sur la direction qu’ils devaient suivre.

Le Renard-Subtil n’avait pourtant pas tout à fait négligé les ruses auxquelles les Indiens ne manquent jamais d’avoir recours lorsqu’ils font retraite devant un ennemi. De fausses traces, laissées à dessein, se rencontraient souvent, toutes les fois qu’un ruisseau ou la nature du terrain le permettait ; mais ceux qui le poursuivaient s’y laissaient rarement tromper, et lorsqu’il leur arrivait de prendre le change, ils le reconnaissaient toujours avant d’avoir perdu beaucoup de temps et fait bien du chemin sur ces traces trompeuses.

Vers le milieu de l’après-midi, ils avaient traversé le Scaroon et ils se dirigeaient vers le soleil qui commençait à descendre vers l’horizon. Ayant franchi une étroite vallée arrosée par un petit ruisseau, ils se trouvèrent dans un endroit où il était évident que le Renard avait fait une halte avec ses prisonnières. Des tisons à demi brûlés prouvaient qu’on y avait allumé un grand feu ; les restes d’un daim étaient encore à peu de distance ; et l’herbe tondue de près autour des deux arbres démontrait que les chevaux y avaient été attachés. Heyward découvrit à quelques pas un beau buisson près duquel l’herbe était foulée ; il contempla avec émotion le lieu où il supposait qu’Alice et Cora s’étaient reposées. Mais quoique cet endroit offrît de toutes parts les traces laissées tant par les hommes que par les animaux, celles des premiers cessaient tout à coup, et ne conduisaient pas plus loin.

Il était facile de suivre les traces des deux chevaux ; mais ils semblaient avoir erré au hasard, sans guides, et suivant que leur instinct les avait dirigés en cherchant leur pâture. Enfin Uncas trouva leurs traces récentes. Avant de les suivre, il fit part de sa découverte à ses compagnons, et tandis qu’ils étaient encore à se consulter sur cette circonstance singulière, le jeune Indien reparut avec les deux chevaux, dont les selles, les harnais et tout l’équipe-