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à être bordée par de hautes montagnes escarpées. Mais il s’y trouvait peu d’îles, et il était facile de les éviter. Les coups de rames bien mesurés se succédaient sans interruption, et les rameurs montraient autant de sang-froid que s’ils venaient de disputer le prix d’une course sur l’eau.

Au lieu de côtoyer la rive occidentale, sur laquelle il fallait qu’ils descendissent, le prudent Mohican dirigea sa course vers ces montagnes, derrière lesquelles on savait que Montcalm avait conduit son armée dans la forteresse redoutable de Ticonderoga. Comme les Hurons paraissaient avoir renoncé à les poursuivre, il n’existait pas de motif apparent pour cet excès de précaution. Cependant ils continuèrent pendant plusieurs heures à suivre la même direction, et ils arrivèrent enfin dans une petite baie, sur la rive septentrionale du lac : les cinq navigateurs descendirent à terre, et le canot fut retiré sur le sable. Œil-de-Faucon et Heyward montèrent sur une hauteur voisine, et le premier, après avoir considéré avec attention pendant quelques minutes les eaux limpides du lac, aussi loin que la vue pouvait s’étendre, fit remarquer à Heyward un point noir, placé à la hauteur d’un grand promontoire, à plusieurs milles de distance.

— Le voyez-vous ? lui demanda-t-il, et si vous le voyez, votre expérience d’homme blanc et votre science dans les livres vous apprendraient-elles ce que ce peut être, si vous étiez seul à trouver votre chemin dans ce désert ?

— À cette distance, je le prendrais pour quelque oiseau aquatique, si c’est un être animé.

— C’est un canot de bonne écorce de bouleau, et sur lequel se trouvent de rusés Mingos qui ont soif de notre sang. Quoique la Providence ait donné aux habitants des bois de meilleurs yeux qu’à ceux qui vivent dans des pays peuplés, et qui n’ont pas besoin d’une si bonne vue, cependant il n’y a pas de sauvages assez clairvoyants pour apercevoir tous les dangers qui nous environnent en ce moment. Les coquins font semblant de ne songer qu’à leur souper ; mais dès que le soleil sera couché, ils seront sur notre piste comme les plus fins limiers. Il faut leur donner le change, ou nous ne réussirons pas dans notre poursuite, et le Renard-Subtil nous échappera. Ces lacs sont quelquefois utiles, particulièrement quand le gibier se jette à l’eau, ajouta le chasseur en regardant autour de lui avec une légère expression d’inquiétude,