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dans le ravin, il vit un homme dans les traits sauvages et féroces duquel il reconnut son guide perfide le Renard-Subtil.

En ce moment de surprise et d’horreur, la prudence du major ne l’abandonna point. Il vit à l’air de l’Indien que ses yeux, accoutumés au grand jour, n’avaient pas encore pu pénétrer à travers l’obscurité qui régnait dans la grotte. Il se flatta même qu’en se retirant avec ses deux compagnes dans un renfoncement encore plus sombre où David était déjà, ils pourraient encore échapper à ses regards ; mais une expression de satisfaction féroce qui se peignit tout à coup sur les traits du sauvage lui apprit qu’il était trop tard, et qu’ils étaient découverts.

L’air de triomphe brutal qui annonçait cette terrible vérité fut insupportable au major ; il n’écouta que son ressentiment, et ne songeant qu’à immoler son perfide ennemi, il lui tira un coup de pistolet. L’explosion retentit dans la caverne comme l’éruption d’un volcan, et lorsque la fumée fut dissipée, Heyward ne vit plus personne à l’endroit où il avait aperçu l’Indien. Il courut à l’ouverture, et vit le traître se glisser derrière un rocher qui le déroba à ses yeux.

Un profond silence avait succédé parmi les Indiens à l’explosion qui leur semblait sortie des entrailles de la terre. Mais lorsque le Renard eut poussé un long cri qu’un accent de joie rendait intelligible, un hurlement général y répondit : tous ses compagnons se réunirent de nouveau, rentrèrent dans l’espèce de défilé qui séparait les cavernes, et avant que Heyward eût le temps de revenir de sa consternation, la faible barrière de sassafras fut renversée, les sauvages se précipitèrent dans la grotte, et saisissant les quatre individus qui s’y trouvaient, ils les entraînèrent en plein air, au milieu de toute la troupe des Hurons triomphants.