Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/70

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que c’était une juste punition des écarts d’une famille qui autrefois se distinguait par son zèle pour la vraie foi ; tandis qu’une troisième classe, et ce n’était pas la moins nombreuse, composée des braves gens qui pour un gain sordide bravaient les éléments dans King-Street, n’hésitait pas à dire que la possession soudaine d’une grande fortune avait fait tourner plus d’une tête meilleure que la sienne.

Mais le temps approchait où le penchant presque irrésistible qui entraînait tous ces bons habitants à former mille conjectures sur le sort d’un de leurs concitoyens devait céder à des considérations plus importantes. L’heure arriva bientôt où le marchand oublia sa curiosité pour calculer dans l’avenir les résultats que pouvaient amener les événements qui se préparaient ; où les fanatiques apprirent cette leçon salutaire, que la Providence favorise toujours ceux qui, par leurs efforts et leur énergie, se montrent les plus dignes de ses bienfaits ; et où les jeunes gens, dégagés de tout sentiment faible ou pusillanime, sentirent leurs cœurs s’embraser de la plus noble, de la plus entraînante de toutes les passions, l’amour du pays.

Ce fut vers cette époque que commença entre le parlement de la Grande-Bretagne et les colonies de l’Amérique septentrionale cette lutte de principes qui, avec le temps, devait amener les importants résultats qui ont établi une nouvelle ère dans la liberté politique, aussi bien qu’un puissant empire. Un coup d’œil rapide sur la cause de cette contestation pourra contribuer à rendre plus intelligible pour quelques-uns de nos lecteurs plusieurs passages de cette légende.

La prospérité toujours croissante des provinces américaines avait attiré attention du ministère anglais dès l’année 1763. Ce fut alors que, pour la première fois, il tenta, par le fameux acte du timbre, de prélever un impôt qui pût subvenir aux besoins de l’état. Cette loi assujettissait les colonies à se servir dans toutes les transactions d’un papier timbré vendu au profit du fisc, et qui était nécessaire pour donner de la validité aux contrats. Cette manière de lever une taxe n’était pas nouvelle en elle-même, et l’impôt était bien léger. Mais l’Américain, avec non moins de sagacité que de prudence, aperçut d’un coup d’œil le danger de reconnaître à un corps dans lequel il n’avait point de représentants le droit de lui imposer des taxes. La question pouvait offrir