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n’était pas en paix, d’un côté on s’occupait avec soin de tous les préparatifs du départ, et de l’autre on attendait impatiemment l’instant où l’on pourrait rentrer sans obstacles dans Boston. Il est inutile de rappeler à nos lecteurs que, les Anglais étant complètement maîtres de la mer, toute tentative pour leur couper la retraite de ce côté aurait été parfaitement inutile.

Une semaine se passa ainsi, après la fin de la tempête, et pendant tout ce temps, on vit régner dans la ville une agitation et une activité extraordinaire, une joie mal déguisée d’une part, et un sombre mécontentement de l’autre, sentiments que devait naturellement produire un événement si inattendu.

Vers la fin d’un de ces jours consacrés aux apprêts tumultueux du départ, on vit sortir un cortège funèbre d’une maison connue depuis longtemps comme la résidence d’une des premières familles de la province. Au-dessus de la porte était suspendu un écusson portant les armoiries de la famille Lincoln et le symbole de la main sanglante, entouré des emblèmes ordinaires de la mort. Ce signe héraldique de deuil, qui n’était adopté dans les colonies qu’au décès de quelque personnage de haute importance, coutume qui a disparu depuis ce temps avec les autres coutumes de la monarchie, avait attiré les yeux de quelques enfants, qui, de tout ce qui se trouvait alors dans Boston, étaient les seuls individus assez peu occupés de ce qui s’y passait pour faire attention à ce spectacle peu ordinaire ; et ils suivirent le cortège peu nombreux qui se dirigeait vers le cimetière de la chapelle du roi.

La bière semblait d’une largeur inusitée, et le drap mortuaire qui la couvrait était si ample qu’il toucha les deux côtés de la porte quand on entra dans l’église. Le ministre dont nous avons eu occasion de parler plusieurs fois vint l’y recevoir, et regarda avec un étrange intérêt le jeune homme en grand deuil qui était à la tête du cortège funèbre. La cérémonie se fit avec toute la solennité d’usage, et l’on entra lentement dans le saint édifice. Derrière Lionel marchaient le commandant en chef des troupes anglaises et son lieutenant favori, Burgoyne. Entre eux était un officier d’un rang inférieur, marchant à l’aide d’une jambe de bois et d’une canne, et qui semblait amuser ses deux compagnons par quelque récit intéressant et mystérieux, jusqu’au moment où l’on arriva dans l’église. Le reste du cortège se composait d’un petit nombre d’officiers à la suite des deux généraux, des domestiques