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qu’ils furent dans l’antichambre. Howe a l’honneur de l’expédition, si toutefois il y a de l’honneur à acquérir dans une affaire aussi vulgaire. Mais allons, accompagnez-moi sur Copp’s-Hill comme spectateur : puisqu’on nous refuse de jouer un rôle dans l’action, peut-être y trouverons-nous l’épisode d’un poëme burlesque, sinon d’un poëme épique.

— Pardonnez-moi, général Burgoyne, dit Lionel, si je vois la chose d’un air plus sérieux que vous.

— Ah ! j’oubliais que vous étiez avec Percy lors de la chasse de Lexington ! interrompit le général. Eh bien ! nous l’appellerons donc une tragédie, si cela vous convient mieux. Quant à moi, Lincoln, je suis las de ne voir que des rues tortueuses et des maisons lugubres, et, comme j’ai du goût pour la belle nature, j’aurais pris depuis longtemps ma volée pour aller visiter un peu les plaines désertes de ces paysans, si j’en avais eu le pouvoir aussi bien que le désir. Mais voici Clinton qui vient nous joindre ; il va nous accompagner à Copp’s-Hill, ou nous pourrons tous prendre une leçon excellente, en étudiant la manière dont le cher Howe va faire manœuvrer ses bataillons.

Un militaire de moyen âge les joignit dans ce moment. S’il n’avait point la grâce et l’aisance du général qui continuait à donner le bras à Lionel, il avait un air martial et intrépide qui contrastait avec l’extérieur doux et pacifique de Gage. Ils quittèrent alors ensemble la maison du gouverneur, pour aller se placer sur l’éminence dont il a déjà été si souvent question.

— Dès qu’ils entrèrent dans la rue, Burgoyne quitta le bras de son compagnon et marcha avec dignité à côté de l’autre général. Lionel profita avec plaisir de ce nouvel arrangement pour se tenir un peu en arrière de ses supérieurs, et il ne les suivit qu’à quelques pas de distance, afin d’observer les sentiments que manifestaient les Bostoniens, observations auxquelles les généraux ne croyaient pas devoir abaisser leur dignité. À toutes les fenêtres on voyait des femmes pâles et inquiètes avancer timidement la tête, tandis que les toits des maisons et les clochers des églises étaient couverts de spectateurs plus hardis et non moins curieux. Le bruit des tambours ne retentissait plus dans les rues, mais de temps en temps le son perçant d’un fifre se faisait entendre du côté de la mer, et annonçait les mouvements des troupes qui allaient passer sur l’autre péninsule. Mais ce ne fut que lorsque