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puissant dans le cceur de tous les soldats ; ils s’avancèrent intrépidement, suivant de près leur vieux guide qui avait mis son cheval au petit trot.

L’air était imprégné de la douce odeur du matin ; l’œil commençait à découvrir distinctement les objets ; les troupes reprenaient un nouveau courage et oubliaient tout ce qu’elles avaient souffert pendant la nuit en marchant au milieu d’une obscurité profonde le long d’une route inconnue et qui semblait interminable. Le but de leur expédition semblait alors se rapprocher d’eux ; ils redoublaient d’ardeur pour l’atteindre plus vite, et leur enthousiasme ardent, mais silencieux, paraissait défier tous les obstacles. L’architecture simple de l’église et des humbles demeures qui l’environnaient attirait l’attention des troupes, lorsque trois ou quatre cavaliers armés, s’élançant d’un sentier de traverse, s’efforcèrent de passer en tête de la colonne.

— Rendez-vous ! s’écria un officier qui était en avant, rendez-vous, ou fuyez à l’instant.

Les hommes tournèrent bride aussitôt, et s’éloignèrent en toute hâte. L’un d’eux essaya de tirer un coup en l’air pour donner l’alarme, mais son fusil fit long feu. L’ordre circula à voix basse dans les rangs de marcher en avant, et au bout de quelques minutes ils entrèrent dans le hameau, et se trouvèrent en face de l’église, auprès de laquelle s’étendait une petite prairie. Quelques hommes la traversèrent rapidement au bruit du son d’un tambour qui se faisait entendre à peu de distance, et bientôt on aperçut un petit corps de milices provinciales rangées fièrement en ordre, comme si elles allaient passer une revue.

— En avant l’infanterie légère ! s’écria le chef en piquant des deux, suivi de ses officiers, et avec tant de rapidité qu’il disparut bientôt derrière un angle de l’église.

Lionel s’empressa de s’élancer sur ses traces. Son cœur battait violemment, et mille images affreuses se présentaient en foule à son imagination, lorsque la voix rauque du major retentit avec force sur toute la ligne :

— Dispersez-vous, rebelles ! s’écria-t-il ; dispersez-vous ! Mettez bas les armes et dispersez-vous !

Ces paroles mémorables furent suivies à l’instant de plusieurs coups de pistolet et de l’ordre fatal de faire feu ! Aussitôt le cri du carnage fut poussé par tous les soldats, qui s’élancèrent sur la