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— Il est certain qu’il n’a pas choisi le bassin le plus favorable, dit Bob en lançant le reste de sa chique dans le Cratère ; mais, monsieur Marc, m’est avis qu’il, pourra nous être utile de plus d’une façon, même où il est, si nous pouvons le maintenir à flot. La provision d’eau qui s’y trouve peut nous durer un an, pour peu que nous ne la prodiguions pas ; et quand viendra la saison des pluies, ce qui ne peut manquer d’arriver dans cette latitude, il ne tiendra qu’à nous de la renouveler. Et puis ce sera une maison pour nous, et une fière maison encore, je vous en réponds ! Vous habiterez l’arrière, et moi je suspendrai mon hamac sur le gaillard d’avant, comme si rien n’était arrivé.

— Laissons là ces distinctions, Bob, et qu’il n’en soit plus question entre nous. Le malheur, comme la tombe, nous rend tous égaux. Nous sommes partis du même point, nous avons mangé à la même gamelle, et il est bien probable que nous finirons comme nous avons commencé. Mais j’y songe : il est encore un moyen d’utiliser le Rancocus, dont vous n’avez point parlé, et qui est peut-être notre meilleure chance de salut. Nous pouvons le démonter, et, avec les pièces, construire une embarcation assez grande pour naviguer sur ces mers tranquilles ; et qui puisse cependant passer à travers et même par-dessus les blocs de lave. De cette manière, avec l’aide de la divine Providence, nous pouvons encore espérer de revoir nos amis.

— Courage, monsieur Marc, courage ! j’aime à vous entendre parler ainsi. Je sens, quand on a devant les yeux l’image d’une jolie petite femme qui vous tend les bras, qu’il serait cruel de ne pas s’ingénier de toutes les façons pour la rejoindre. Robinson lui-même a bien fini par démarrer, quoiqu’il ait eu une traversée diablement rude. Eh bien ! va pour la petite chaloupe, et je vous promets de vous donner un bon coup de main, et de tout mon cœur, quand vous vous mettrez à l’œuvre. Je ne suis pas un charpentier fameux, ça c’est vrai ; et s’il faut vous parler franchement, je ne crois pas non plus que vous vous entendiez très-bien à manier la hache et le rabot ; mais qu’importe ! deux hommes solides et de bonne volonté, et qui ont leur vie à sauver