Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/299

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

défense en face du pont-levis et, dans cette position, elle était située à proximité de la source, avantage d’autant plus grand que l’eau manquait au Récif. Lorsque le gouverneur chargea son frère, l’inspecteur général, de tracer le plan d’une ville celui-ci regarda comme de la première nécessité de remédier à cet inconvénient. Il choisit un endroit propice, et fit pratiquer dans le roc une citerne, destinée à recevoir les eaux pluviales provenant du toit de la Maison du gouvernement. Ce réservoir contenait plusieurs milliers de gallons, et, une fois plein, il devait être suffisamment alimenté par les pluies.

Dès que le gouverneur se fut décidé à bâtir, et à faire du Récif sa capitale, il voulut procéder méthodiquement et ne rien négliger pour l’embellir.

Décidé à pousser activement les travaux, il envoya l’Abraham au jeune Ooroony pour lui demander encore son assistance. Le jeune chef fut enchanté d’accorder ce qu’on réclamait de lui ; et il vint en personne avec cinq cents de ses sujets, pour aider son allié à accomplir sa tâche. Cette masse d’ouvriers travailla deux mois entiers, au bout desquels le gouverneur annonça que tout était terminé, et congédia ses voisins, qui emportèrent tous des gages de sa reconnaissance. On avait craint pendant quelque temps qu’il n’y eût danger à attirer tant de sauvages au Récif ; mais le gouverneur n’eut pas lieu de se repentir de sa confiance. Au contraire, ces rapports produisirent un excellent effet, et les liens des deux peuples s’en resserrèrent davantage. Le gouverneur était, du reste, fort habile dans ces sortes de relations ; non-seulement il avait adouci ces caractères farouches, mais, ce qui était bien plus difficile, il les avait fait travailler. Un blanc faisait, il est vrai, autant de besogne que trois Kannakas, mais ceux-ci étaient si nombreux que pendant leur séjour, ils furent pour les colons de puissants auxiliaires.

Mais si les Kannakas étaient admis au Récif, il n’en était pas de même au Pic, dont le gouverneur ne souffrait jamais qu’aucun d’eux approchât. La sorte de mystère qui planait sur cette île redoutable pouvait contribuer à les tenir en respect, et le