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l’Est ; que nos cœurs sont aussi égoïstes et aussi froids que nos manières, et que nous vivons plus pour les passions basses et vulgaires que pour les sentiments affectueux. Nous faisons des vœux sincères pour que la jalousie des Européens ne leur inspire jamais que des reproches aussi faux que celui-là. Que les Américains soient plus réservés dans l’expression de leurs émotions que les autres, nous le croyons ; mais que les Européens aient seuls la sensibilité en partage, voilà ce dont nous ne pouvons convenir. Nous contestons surtout que nulle part on puisse trouver chez les femmes des cœurs plus vrais dans leurs affections, des âmes plus dévouées aux intérêts de leur famille, en un mot une existence plus égale et plus parfaite que chez l’épouse américaine. C’est elle qui est vraiment pour son mari « les os de ses os, et la chair de sa chair. » Rarement ses désirs s’étendent au delà du cercle de sa famille qui renferme tout ce qu’elle peut souhaiter de plus doux. Son époux, ses enfants, voilà son univers, et, concentrées sur eux, il est rare que ses affections viennent à s’égarer. Cette vie, toute d’intérieur, est sans doute due en partie à la simplicité de l’éducation et à l’absence de toute tentation. Mais en même temps il y a tant de dévouement dans son cœur, tant d’empressement à en suivre les inspirations, et à se livrer exclusivement aux devoirs de la famille, que le reproche auquel nous faisons allusion est de tous celui qui peut le moins s’appliquer à la femme américaine.

Il faisait presque nuit lorsque le gouverneur se retrouva au milieu des colons. Déjà ceux-ci avaient jeté un coup d’œil sur le Récif et les îles voisines, et les plus difficiles d’entre eux furent trompés en bien sur les avantages du pays qu’ils allaient habiter. L’impression favorable que tous éprouvèrent était due peut-être à l’abondance des fruits des Tropiques. Peu à peu, plus de mille orangers avaient été plantés sur le Cratère et dans les alentours, et ils étaient en plein rapport. On en voyait aussi s’élever sur les îles adjacentes. Quelques-uns de ces arbres étaient encore, il est vrai, un peu jeunes, mais enfin ils portaient des fruits, et pour ces hommes arrivés de la Pensylvanie, quel délice de se