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— Il y a toujours de la glace du côté de la terre, Hasard, et c’est de ce côté que vous aurez aperçu cette clarté. Cela ne prouve pas encore que nous ne trouverons point d’issue. Il nous est impossible d’hiverner ici, mille raisons s’y opposent ; et, avant tout, l’intérêt de nos armateurs. Nous marchons assez vite le long de la plaine, quoiqu’il me semble qu’on pourrait aller plus vite encore ; ne le pensez-vous pas, Hasard ?

— Mon Dieu, Monsieur, c’est la glace qui en est cause. Il y a plusieurs tonnes de glace sur notre avant.

On vérifia le fait, et Gardiner en éprouva une plus grande inquiétude. Il vit qu’il n’y avait pas de temps à perdre, et il mit toutes voiles dehors pour échapper, s’il était possible, aux dangers qui menaçaient son schooner, et passer dans une température plus douce ; mais il est difficile que même un schooner fin voilier réussisse à marcher, dans de telles circonstances, aussi vite qu’on le désirerait.

Il n’était plus douteux que la rapidité de la marche du Lion de Mer était gênée par la pesanteur de la glace qu’il avait à porter. Heureusement la mer ne jetait pas beaucoup d’écume, ce qui aurait été un inconvénient ajouté au péril que l’on courait.

Cependant, lorsque la plaine de glace qu’on avait d’abord aperçue dans le lointain se fut assez rapprochée pour que tout le monde pût la voir, et que l’on crut qu’il n’y avait plus d’issue pour le schooner, un canal parut s’ouvrir tout d’un coup ; mais après y être entré et y avoir navigué au nord-ouest, on dut perdre tout espoir : ce canal se terminait par un cul-de-sac.

Presque au même instant la glace se rejoignit rapidement dans le sillage du schooner. Il y eut un effort de fait pour rétrograder, mais il manqua ; un énorme morceau de glace menait de flotter dans le centre de ce cul-de-sac, ayant rencontré de la résistance dans une plaine de glace qui se trouvait elle-même arrêtée par des rochers. Roswell vit tout d’abord qu’il n’y avait rien à faire en ce moment. Il serra toute sa voilure autant qu’il était possible de manier de la toile gelée, leva les ancres pointues dont on se sert pour les glaces, et conduisit son vaisseau dans une espèce d’anse où le danger serait moins grand pour le vais-