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tours, et même des statues et des colonnes. Il fallait y ajouter de longues lignes de murs perpendiculaires, qu’on pouvait comparer à des forteresses, à des donjons et à des temples. En un mot, les Alpes elles-mêmes, avec toute la grandeur, qui leur est propre et assurément dans de plus vastes proportions, n’offrent pas d’aspect aussi remarquable par ses rapports avec les œuvres de l’homme ni une matière plus belle et plus transparente. On a souvent, et non sans raison, comparé les glaciers des Alpes à une mer de glace ; mais là on apercevait des montagnes de glace, auxquelles l’art semblait avoir donné toutes les formes, non pas à l’aide du ciseau, il est vrai, mais par l’action des lois infaillibles qui les avaient produites.

Peut-être Roswell fut-il seul cette nuit à apprécier la magnificence extraordinaire de ces merveilleux tableaux. Stephen, sous ce rapport, était, parmi ces marins, une exception à la règle, quoiqu’il vît la main de Dieu en toutes choses.

— Cela serait extraordinaire à voir, capitaine Gar’ner, n’est-ce pas, dit le digne marin lorsque la lumière de la lune commença à donner sur ce spectacle très-extraordinaire, si nous ne savions pas qui a fait tout cela ?

Ce peu de mots donnèrent du courage à Roswell et augmentèrent sa confiance, dans le succès. Dieu a tout fait, directement ou indirectement ; son scepticisme n’aurait osé le nier, et tout ce qui résultait de la sagesse divine doit avoir le bien pour objet. Il prendrait donc courage ; et, pour la première fois de sa vie, il se fierait à la Providence. L’homme le plus résolu sent son courage augmenté par une telle résolution.

Les coups de vent de la mer antarctique sont courts, quoique violents ; ils durent rarement plus de trente-six heures, et un tiers de ce temps avec la plus grande force. Naturellement, par la tempête, le danger devient beaucoup plus grand au milieu des glaces. Cependant les schooners se trouvaient encore dans les eaux sur lesquelles le vent régnait avec fureur, et qu’il soulevait autour des petits schooners jusqu’à leurs plats-bords. Ce qui rendait leur situation encore plus pénible, c’est que l’eau qui tombait sur leur bord gelait presque aussitôt. Il est vrai que les hommes