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faut respecter, dit Daggëet ; mais en mer, je ne m’en préoccupe guère ; il faut qu’un vaisseau marche les jours de fête et les jours ouvriers.

— N’en doutez pas, capitaine Dagget, reprit Stephen, il y a un grand journal là-haut où il est tenu compte de tout. Le Seigneur est Dieu sur mer comme sur terre.

On se tut quelques instants car il y avait dans le ton solennel et la parfaite sincérité de celui qui parlait quelque chose qui faisait de l’impression sur ceux qui l’écoutaient.

Roswell reprit ensuite la conversation qu’il avait déjà commencée, et exposa au capitaine Dagget que son schooner était plein, tandis que celui du Vineyard ne l’était qu’à moitié, sans qu’on pût espérer qu’il réussît maintenant à compléter sa cargaison ; car l’attaque livrée par Macy aux veaux marins serait cause d’un retard d’un mois et l’on pouvait compter que chaque jour on trouverait ces animaux plus farouches. Roswell termina par ces mots :

— Pensez combien il serait grave de nous trouver ici, sous une latitude aussi élevée, après que le soleil nous aurait quittés.

— Je vous comprends, Gar’ner, répondit Dagget tranquillement ; vous êtes maître de votre vaisseau, et je suis sûr que le diacre Pratt serait fort heureux de vous voir arriver entre Shelter-Island et Oyster-Pond. Je ne suis qu’un pauvre estropié ; autrement le schooner du Vineyard ne serait pas de longtemps en retard.

Roswell sentit que sa générosité était mise en question par Dagget, et il en éprouva une irritation assez vive mais il se contint, et, malgré quelques mots amers du capitaine du Vineyard, Roswell lui donna une nouvelle preuve de dévouement.

— Voici ce que je ferai, Dagget, dit Gardiner comme un homme qui a pris son parti. Je resterai encore ici une vingtaine de jours, et je vous aiderai à faire votre cargaison ; après quoi je mettrai à la voile, quoi qu’il arrive. Ce sera rester aussi longtemps que la Providence peut le permettre sous une latitude aussi élevée.

— Donnez-moi la main, Gar’ner. Je savais bien que vous aviez du cœur et qu’il se montrerait en temps opportun. J’espère que la Providence nous protégera ; c’est vraiment dommage de perdre