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et, qu’on pût à peine donner aux nuits le nom de nuits, cependant le soleil ne baissait jamais beaucoup sans laisser dans l’atmosphère une fraîcheur qui aurait rendu un campement en plein air non-seulement incommode, mais dangereux. Il était même souvent nécessaire de faire du feu dans le magasin. On avait un poêle aussi vieux que la maison, et le schooner se trouvait muni d’une bonne provision de bois. L’avarice même du diacre avait reconnu qu’une telle provision était nécessaire.

Il fallut environ une quinzaine de jours pour achever cette installation provisoire sur la cime d’un rocher, tandis que la chasse aux veaux marins continuait avec beaucoup d’ardeur et de succès. Les victimes étaient si peu farouches, et ignoraient tellement le danger dont les menaçait la présence de l’homme, que l’équipage passait au milieu des veaux marins sans qu’il parût que ces animaux s’en aperçussent, et sans qu’on eût à repousser aucune attaque. On avait le plus grand soin de ne leur causer aucune alarme inutile, et lorsqu’on tuait un animal, on s’efforçait d’exciter le moins d’agitation possible parmi les autres animaux. Cependant, au bout de cette quinzaine, l’opération prenait de telles proportions qu’il fallût que l’équipage entier s’en occupât, et bientôt le banc de rochers qui se trouvait au-dessus de la maison fut couvert de barils et de peaux. S’il ne s’était agi que de tuer, d’écorcher, de sécher et de mettre l’huile en tonneaux, le travail eût été relativement léger ; mais il fallait transporter les produits de tout ce travail à des distances considérables, dans certains cas à plusieurs milles, et cela par-dessus des rochers. Roswell Gardiner était persuadé qu’il aurait rempli son vaisseau en un mois, s’il lui avait été possible de le mettre à l’ancre près des rochers fréquentés par les veaux marins, et d’éviter toute la perte de temps que lui causait le transport des objets qui devaient former sa cargaison. Cela était impossible, car les vagues et la glace auraient exposé à une destruction certaine un navire qui aurait jeté l’ancre près du rivage nord de l’île. On se servait quelquefois des chaloupes pour transporter des peaux et des huiles en faisant le tour du cap.

Au bout de la troisième semaine, le fond de la cale était plein,