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Le temps, quoique très-beau pour ces régions, était menaçant. Il en est ainsi ordinairement dans ces contrées, qui semblent être le pays favori des tempêtes. Bien que le vent ne soufflât pas plus fort qu’une bonne brise, et que l’Océan ne fût pas très-agité, il y avait dans l’atmosphère et dans les courants de terre qui venaient du sud-ouest, des symptômes qui avertissaient le marin de la nécessité d’être prudent. Nous croyons que c’est plutôt pendant l’été que dans l’hiver qu’on est exposé aux gros temps dans ces parages.

Mais il y a quelque chose de si vivifiant dans l’air de l’Océan en été, et quelque chose de si glacial dans la saison contraire, que beaucoup d’entre nous s’imaginent que les courants d’air correspondent avec la chute du mercure. Roswell en savait plus que cela, sans doute, mais encore il savait où il était et ce qu’il avait à faire. Comme chasseur de veaux marins, il était allé plusieurs fois au midi aussi loin que le nec plus ultra de Cook ; mais ç’avait toujours été dans des positions secondaires. C’était la première fois qu’il avait la responsabilité du commandement, et il était naturel qu’il sentît le poids du fardeau qu’il avait à porter.

Tant qu’il avait eu en vue le Lion de Mer du Vineyard, ce vaisseau avait occupé sa pensée, il s’était d’abord efforcé de se débarrasser du schooner rival ; mais maintenant qu’il était, pour ainsi dire, sorti de son sillage, les grands et prochains obstacles de son entreprise se dressaient devant lui. Roswell était donc pensif et grave, ses traits reflétant avec assez de fidélité l’aspect triste de l’atmosphère et de l’Océan.

Boswell ne pensait pas qu’il fût très-probable qu’il rencontrât maintenant l’autre Lion de Mer, d’autant plus que les îles qu’il cherchait n’étaient dans le voisinage d’aucune terre, et par conséquent en dehors de la route ordinaire des chasseurs de veaux marins. Cette dernière circonstance, que notre jeune navigateur savait très-bien apprécier, lui donnait l’espoir d’être seul à s’emparer des trésors de ces îles, s’il pouvait découvrir les parages où la nature les avait cachés.

À peine la nuit se fut-elle abaissée sur l’horizon, que Roswell ordonna au timonier de virer vers le sud. C’était un changement