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prit d’aventure de ceux dont les calculs sont aussi audacieux que les actes.

L’audace, comme les Français l’appellent, est une grande qualité dans la guerre, et souvent elle obtient plus que la sagesse qui sait calculer ; nous ne sommes pas sûrs que l’audace ne soit pas quelquefois aussi puissante dans le commerce. En tout cas, on regardait comme un véritable exploit de la part d’un petit schooner comme le Lion de Mer d’Oyster-Pond, d’avoir pris une baleine de cent barils d’huile.

De longs mois, pleins d’anxiété, succédèrent ensuite pour Marie à ce rayon de soleil qui avait lui sur son cœur toujours inquiet en l’absence de Roswell. Elle savait qu’elle ne devait guère espérer d’avoir de ses nouvelles avant qu’il revînt du nord. Cependant, le diacre reçut une courte lettre de Roswell, d’une date postérieure de deux semaines à celle qu’il avait écrite de Rio, et venant d’un parage sous le 41e degré de latitude, aussi loin au sud de l’équateur qu’Oyster-Pond en était au nord, et presque à quatorze cents milles sud de Rio. Roswell avait écrit cette lettre fort à la hâte pour l’envoyer par un navire de commerce de la mer Pacifique, qu’il rencontra par hasard, plus près de la côte qu’on n’a l’habitude d’y voir ces sortes de vaisseaux. Cette lettre disait que tout allait bien, que le schooner de Dagget n’avait point cessé d’accompagner celui d’Oyster-Pond, et que Gardiner comptait s’en séparer à la première occasion.

Après la réception de cette lettre, la troisième écrite par Roswell depuis qu’il était parti, il y eut un long intervalle de silence. Ce fut alors que les mois s’écoulèrent dans une inquiète et sombre incertitude. Le printemps suivit l’hiver, l’été succéda au printemps, et l’automne vint recueillir le fruit de toutes les saisons précédentes, sans apporter plus de nouvelles de nos aventuriers. Puis l’hiver revint pour la seconde fois depuis que le Lion de Mer avait mis à la voile, remplissant de tristes appréhensions le cœur des amis que les marins avaient laissés à Oyster-Pond, lorsqu’ils entendaient le gémissement des vents qui règnent dans cette froide et orageuse saison.

Le diacre avait presque renoncé à tout espoir, et sa santé