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jamais qu’un bon écorcheur de baleines qui commandera un vaisseau à moi.

— Roswell est un brave garçon, répondit Marie les yeux remplis de larmes, pendant que son oncle faisait l’éloge du jeune homme qu’elle aimait ; personne ne le connaît mieux que moi mon oncle, ajouta-t-elle, et personne ne l’estime davantage. Mais ne vaut-il pas mieux lire le reste de la lettre ? il y a encore beaucoup à lire.

— Continue, mon enfant, continue ; mais relis cette partie de la lettre où il parle de la quantité d’huile qu’il a expédiée à Fish et à Grinnel.

Marie fit ce que son oncle lui demandait, et elle acheva ensuite de lire la lettre.

« Je me suis trouvé assez embarrassé, disait Roswell, à l’égard de la conduite que je devais tenir envers le capitaine Dagget ; il m’a montré tant de dévouement au cap Hatteras, que je n’ai pas voulu me séparer de lui, soit pendant la nuit, soit à l’occasion d’un gros temps, ce qui aurait semblé ingrat de ma part ; j’ai craint aussi d’avoir l’air de me sauver. J’ai peur que l’existence de nos îles ne lui soit pas inconnue, quoique je doute qu’il en ait la longitude et la latitude exactes. Il y a quelque chose qui me le fait croire dans l’attitude de l’autre équipage et dans certains propos qu’on y a tenus à mes hommes. Il m’est souvent venu à la pensée que Dagget ne nous suivait de si près que pour apprendre de nous ce qu’il voudrait savoir. »

— Arrête-toi ici, Marie, arrête-toi un peu, et laisse-moi le temps de réfléchir. N’est-ce pas horrible, mon enfant ?

La nièce pâlit, et fut vraiment effrayée du désespoir du diacre, quoiqu’elle n’en connût pas la cause.

— Qu’y a-t-il d’horrible, mon oncle ? demanda-t-elle à la fin, voulant savoir la vérité, quelle qu’elle fût.

— L’avarice de ces gens du Vineyard ! c’est quelque chose d’horrible et d’affreux. Il faut que je prie le révérend M. Whittle de prêcher contre le péché d’avarice : c’est un vice qui gagne tant de terrain en Amérique ! Toute l’église devrait s’élever contre ce vice, ou bientôt il élèvera la voix contre l’église !