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ners s’occuperont de leur affaire et les dirigeront au vent sans se laisser surprendre par la nuit.

M. Hasard s’est engagé, Monsieur, à montrer en cette occasion toute sa vigilance, et je pense qu’il en est capable. Voyez, Monsieur, voyez !

Cet avis venait à propos ; car, en ce moment même, la baleine cessa de nager, et, levant son énorme queue, elle frappa cinq à six fois la surface de l’eau, ce qui fit un bruit qu’on aurait pu entendre d’une demi-lieue, sans parler de l’écume qui remplit l’atmosphère.

Dès que la queue parut dans l’air, on lâcha de la corde qui tenait le harpon, ce qui augmenta de cent pieds la distance entre la chaloupe et la baleine. Rien ne pouvait mieux montrer le caractère intrépide de ces pêcheurs baleiniers que le spectacle offert en ce moment par Roswell Gardiner et ses compagnons. Au milieu de l’Atlantique, à plusieurs lieues de leur vaisseau, et n’ayant aucun autre navire en vue, ils restaient patiemment assis attendant l’instant où le géant de la mer ralentirait sa marche, pour l’approcher et achever la capture.

La plupart des hommes d’équipage étaient assis, les bras croisés et le corps à moitié tourné ; ils contemplaient ce spectacle, tandis que les deux officiers, le capitaine et le timonier, surveillaient chaque mouvement du monstre marin avec une vigilance qui ne laissait échapper aucun signe ni aucun symptôme.

Tel était l’état des choses, la baleine battant toujours la mer de sa terrible queue, lorsqu’un cri, qui s’éleva du milieu de ses hommes d’équipage, vint frapper l’oreille de Roswell, qui en se tournant aperçut Dagget à la poursuite d’un petit taureau de mer qui nageait avec une grande rapidité, traînant après lui la chaloupe de Dagget.

Roswell crut d’abord qu’il serait forcé de renoncer à sa baleine, tant l’autre animal venait en ligne directe avec son propre bateau. Mais intimidé probablement par les terribles coups dont le plus gros taureau de mer continuait de labourer l’Océan, l’animal qui était le plus petit recula assez à temps pour éviter une collision, quoiqu’il fît d’abord le tour de l’espace où se trouvait le redou-