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la côte américaine, dans un sens au moins. Les grands détroits qui s’étendaient entre les grèves formées par les sables, rendaient la navigation aussi difficile que les bas-fonds qui se trouvaient au nord ; cependant il aurait bien mieux aimé naviguer dans un de ces détroits que d’aller tomber sur les brisants qu’on rencontrait en dehors. L’équipage du Vineyard se trouvait encore dans la meilleure position, étant au vent de la longueur d’un câble, et, dans cette mesure, plus loin de sa perte. Cet avantage toutefois n’était pas très-important dans le cas où le vent continuerait de souffler avec la même violence, le salut devenant alors impossible pour les deux vaisseaux. La situation des deux bâtiments se trouvait en effet si critique, qu’il leur était également impossible de céder une seule brasse de l’espace qu’ils occupaient. Tous les yeux se dirigèrent bientôt sur le passage ; or, on avait résolu d’en tenir éloigné le Lion de Mer d’Oyster-Pond, si ce passage était sous le vent.

On apercevait maintenant d’une manière très-distincte la ligne des brisants, et à chaque minute, non-seulement elle semblait se rapprocher, mais elle se rapprochait en effet. On s’efforça de trouver un mouillage, expédient auquel les marins ont toujours recours avant d’échouer, quoique ce fût sans beaucoup d’espoir.

Hasard avait dépeint le schooner comme sautant dans la mer. Cette expression n’est pas sans justesse, appliquée à de petits vaisseaux, et surtout dans cette occasion. Bien que construit avec beaucoup de soin quant à la légèreté, ce vaisseau faisait des plongeons dans les vagues qu’il rencontrait, et où il allait presque disparaître ; une fois ou deux, le choc fut si violent, que ceux qui se trouvaient à bord crurent qu’ils avaient touché le fond. La sonde, cependant, donnait assez d’eau, quoique les hauts-fonds fussent constants et croissants, et avec une continuité qui avait quelque chose de menaçant. Tel était l’état des choses, quand le schooner fit un de ces plongeons et rencontra une force qui le repoussa comme s’il était allé se heurter contre un rocher.

Le grand mât était solide dans une certaine mesure, mais il n’était pas assez gros ; un pouce ou deux de plus en diamètre