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une grande besogne que le renouvellement de tous les baux qui étaient expirés. Les fermiers n’avaient conservé leurs terres que par tolérance, et seulement d’année en année en vertu de conventions verbales, suivant l’autorisation qui en avait été donnée à M. Newcome.

Il était rare, ainsi que je l’ai déjà dit, qu’un propriétaire retirât quelque revenu de ses terres dans les premières années. Le grand point était d’engager les colons à venir ; la concurrence était grande, et il fallait faire des sacrifices pour les attirer. Aussi mon grand-père avait-il affermé presque toutes ses terres pour des rentes purement nominales ; et le plus souvent, à l’exception de quelques fermes d’une qualité supérieure, aucun rendage n’avait été payé. Le colon acquittait les taxes qui n’avaient d’autre objet que de faire face à des dépenses d’un intérêt immédiat, telles que la construction de routes, de ponts et d’autres ouvrages de ce genre, et l’administration de la justice. À l’expiration de cette période qu’on pourrait appeler expectante, une petite somme devait être payée par acre, mais ne l’était jamais, ou du moins n’arrivait jamais jusqu’au propriétaire, qui devait toujours mettre son nom en tête de toutes les listes de souscription pour des entreprises utiles. C’était à cela que passait le peu d’argent qu’il pouvait recueillir. Sans doute, à force de vexations et d’importunités, il eût pu réaliser quelques sommes de peu d’importance ; mais il n’eût pas été d’une bonne politique de le tenter. En général, les propriétaires de l’État de New-York étaient riches, et n’attendaient pas après leurs revenus. Ils conservaient leurs terres et cherchaient à les améliorer. Le métier qui consiste à mettre en action le jeu de « Ôte-toi de la que je m’y mette, » était peu connu avant la révolution, et celui qui aurait cherché à profiter de quelque chance favorable pour acheter à vil prix un bien patrimonial, aurait été vu de mauvais œil. Les spéculations légales n’étaient pas inventées, et le seul moyen honorable de s’enrichir était par le travail, par l’industrie, et non par des machinations plus ou moins loyales.

Pour nous, jamais nous n’avions retiré un schelling de notre propriété de Ravensnest. Tout ce qui avait été reçu, et plus encore, avait été dépensé sur les lieux ; mais le temps était venu