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— Si ce n’est avec les flèches de Cupidon, répondit Bulstrode avec un ton de galanterie comique ; car avec ces armes-là vous faites de terribles ravages ; j’en sais quelque chose, moi, qui me trouve placé entre les deux.

Bientôt ce fut le moment de porter les santés, et M. Mordaunt donna l’exemple en proposant celle de miss Markham, vieille demoiselle à laquelle il passait pour avoir fait un doigt de cour dans son temps ; ce fut ensuite le tour d’Anneke, et son toast fut : À la troupe des comédiens amateurs ! Puisse-t-elle se distinguer autant dans les arts de la paix qu’elle l’a fait au champ d’honneur !

De grands applaudissements suivirent ce toast ; et Bulstrode ayant dit tout bas à Harris qu’il ne pouvait se dispenser de répondre au nom du régiment, Harris tourna tant bien que mal quelques phrases que Bulstrode interrompait à chaque mot en criant : Bravo ! à merveille ! Écoutez, écoutez ! En finissant, le jeune officier but à la santé des belles de New-York, aussi remarquables par leur esprit que par leurs attraits.

— Bravo ! s’écria de nouveau Bulstrode, de mieux en mieux ; décidément Harris est en veine.

— Allons, Bulstrode, à votre tour.

— Moi, j’ai l’honneur de proposer la santé de lady Dolly Merton.

Personne de nous, que je sache, ne connaissait cette lady Dolly. D’autres toasts suivirent, puis on pria les dames de chanter. Anneke donna l’exemple sans se faire prier, et jamais je n’avais entendu de voix plus douce ; l’air était simple, mais d’une mélodie charmante, et il fut chanté avec une grâce inexprimable. Bulstrode était ravi, et je l’entendis murmurer : Elle chante vraiment comme un ange ! Son tour vint ensuite, et il chanta une romance avec beaucoup d’expression. Harris chanta ensuite, à peu près comme il parlait ; puis Mary Wallace. Herman Mordaunt lui-même entonna une chanson bachique. Je fus alors invité à payer mon écot ; j’obéis ; j’avais beaucoup de goût pour la musique, et j’avais lieu de croire que je ne m’en tirerais pas plus mal que les autres. Quelques larmes que je crus remarquer