- Albamazar.
e ne parlerai point de la douleur que nous fit éprouver la
perte de Guert. Tout le monde resta sur pied toute la nuit pour
se tenir sur ses gardes ; mais ce fut une précaution inutile : aucune
alerte n’eut lieu. Une ou deux heures après le lever du
jour, Susquesus rentra, et il nous annonça que les ennemis
s’étaient retirés du côté de Ticonderoga. Il n’y avait plus rien à
craindre de leur part, et les colons ne tardèrent pas à retourner
dans leurs habitations, du moins dans celles qui avaient été
épargnées. Les autres furent reconstruites successivement, et les
coups de hache retentirent de nouveau dans la forêt. Comme
Bulstrode ne pouvait pas encore être transporté sans inconvénient,
Herman Mordaunt se décida à passer le reste de la saison
à Ravensnest. Il n’était pas fâché en même temps d’encourager
ses colons par sa présence. Le danger était passé, du moins pour
la fin de l’été, et l’on espérait que la Grande-Bretagne, blessée
si profondément dans son honneur, ne tarderait pas à prendre sa
revanche et à chasser l’ennemi de la province, ce qui ne manqua
pas d’arriver.
Il parut convenable de transporter le corps de Guert à Albany, pour qu’il reposât au milieu des siens. Je l’accompagnai avec Dirck et le révérend M. Worden, dont le zèle pour les missions apostoliques était singulièrement refroidi.
— Voyez-vous, Corny, me dit-il pendant que nous marchions derrière la litière qui portait les restes du pauvre Guert, c’est une tentative prématurée que de vouloir introduire le christianisme sur cette frontière. La religion chrétienne demande un