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natures qu’il fût possible de rencontrer. Il était bien difficile de le mettre en colère ; mais, quand cela arrivait, un ouragan n’eût pas été plus terrible. Je le vis une fois en fureur, et j’aurais autant aimé me laisser enfermer dans la loge d’un animal féroce, que d’aller me heurter contre lui dans ce moment-là.

Je ne sais trop si je devrais me permettre de parler maintenant de moi-même. J’étais fort, actif, d’une belle venue ; et j’ai lieu de croire que je n’avais pas trop mauvaise mine, quoique je préférasse de beaucoup que ce fût un autre que moi qui le dît. Dirck et moi nous avions souvent essayé nos forces dans notre enfance, et j’avais eu toujours le dessus ; mais quand mon ami fut arrivé à l’âge de dix-huit ans, sa carrure athlétique fit pencher la balance en sa faveur. Je ne me souciai plus trop de me mesurer avec lui, bien que mon agilité extraordinaire compensât un peu l’inégalité. Je ne devrais pas employer ce mot extraordinaire en parlant de moi ; il m’est échappé involontairement, et je ne l’effacerai pas maintenant. Je n’ajouterai plus qu’un mot ; le lecteur en pensera ce qu’il voudra : j’étais d’un bon naturel, disposé à la bienveillance pour mes semblables, et n’ayant pour l’argent qu’un attachement raisonnable.

Voilà le portrait de trois des principaux acteurs dans la scène que je vais raconter ; scènes qui pourront avoir quelque intérêt pour ceux qui aiment à lire le récit d’aventures arrivées dans un pays nouveau.


CHAPITRE IV.


Ne nous décourageons pas, et, quelque chose qui arrive, sachons travailler et attendre.
Longfellow



Je venais d’avoir vingt ans lorsque je partis avec Dirck pour aller visiter New-York pour la première fois ; la distance n’était que de vingt-cinq milles en passant par King’s-Bridge ; et cepen-