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dans l’espoir de trouver des chevelures à couper dans quelque détachement envoyé à l’arrière-garde avec des officiers blessés.

— Mais alors notre ami Bulstrode pourrait courir quelque danger.

— Il est probable qu’il se sera fait porter à Ravensnest, et qu’il y est en sûreté. Quoi qu’il en soit, Corny, je n’aime pas ces empreintes dont vous me parlez. Une Peau Rouge comme l’Onondago se trompe rarement en pareil cas.

— Il est trop tard à présent pour rien faire ce soir, dit Dirck. D’ailleurs, je ne pense pas qu’il puisse arriver rien de très-fâcheux à aucun de nous ; autrement Dorothée nous en aurait dit quelque chose. Ces sorcières manquent rarement de donner quelque avertissement sous une forme ou sous une autre, quand il se prépare quelque grave événement. Vous voyez, Corny, que nous sommes sortis de toute cette bagarre sans avoir reçu une égratignure, et c’est en faveur de ses prédictions.

Pauvre Dirck ! il était toujours sous le charme. Il avait une foi robuste, et il allait même jusqu’à faire honneur à Dorothée de son silence. Mais néanmoins Dirck avait raison en un sens, c’est qu’il était trop tard pour agir. Il ne s’agissait que de chercher les moyens de pourvoir à notre sûreté pendant la nuit.

L’Indien fut admis à notre délibération. Il fut décidé que la porte serait fortement barricadée, et que nous coucherions tous dans l’intérieur, car les nègres et les Indiens passaient presque toujours la nuit dehors, sous des hangars qu’ils s’étaient construits eux-mêmes avec des broussailles. Il semblait évident qu’après avoir visité la hutte, et l’avoir trouvée vide, l’ennemi, s’il fallait lui donner ce nom, ne reviendrait pas immédiatement, et que cette circonstance seule assurait pour le moment notre tranquillité. Nous avions en outre la chance que ce fussent des vestiges d’Indiens amis et non pas de Hurons, quoique Susquesus ne manquât jamais de faire un signe de tête d’incrédulité, toutes les fois que cette idée était mise en avant. En tout cas, nous n’avions le choix qu’entre trois expédients : ou abandonner la propriété, et chercher notre salut dans la fuite ; ou aller camper dans les bois, ou nous enfermer dans notre forteresse. Le