Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 25, 1846.djvu/225

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mieux. C’était encore là une de ces idées connecticutiennes de Jason Newcome. Il s’imaginait qu’il connaissait toutes les personnes comme il faut du West Chester, parce qu’il avait habité le comté un an ou deux ; et par le fait il n’avait jamais parlé au plus grand nombre. Mais, suivant lui, il suffisait de voir quelqu’un sortir de sa maison, passer dans la rue ou entrer à l’église, pour le connaître ; et de cette manière on conçoit que le cercle de ses connaissances devait s’élargir à l’infini.

Herman Mordaunt avait pris des arrangements très-judicieux pour son voyage. Il avait fait construire une voiture couverte, où il y aurait place non-seulement pour lui et pour ses deux compagnes, mais même pour une partie des objets dont ils pouvaient avoir besoin pendant leur résidence dans les forêts. Un autre chariot, vaste et solidement construit, devait contenir les vivres et le reste des bagages. Ce fut un grand plaisir pour lui de me montrer tout cela, et de me parler du bonheur qu’il aurait à être accompagné de sa fille. J’ai toujours pensé qu’Anneke n’avait écouté que son affection pour son père en prenant cette résolution, tandis que son père espérait sans doute secrètement que Bulstrode trouverait des occasions plus faciles de faire sa cour et de se faire définitivement agréer. J’approuvai les dispositions qui avaient été prises ; je me permis d’indiquer une ou deux modifications dans l’intérêt d’Anneke et de Mary, et nous nous séparâmes. Un ou deux jours après, le régiment de Bulstrode se mit en marche pour le Nord. Les troupes partirent une demi-heure après le lever du soleil, précédées et suivies de nombreux caissons portant les bagages. Cependant on n’emportait pas de tentes ; on allait dans une région où il ne faut pas plus de temps pour construire des huttes, qu’il n’en faudrait pour dresser des tentes ; et en douze jours de marche le détachement avait rejoint le poste qu’il devait occuper, destiné qu’il était à appuyer deux ou trois autres corps, placés encore plus en avant, afin d’assurer la liberté des communications.

Bulstrode ne partit pas en même temps que son régiment. Le matin même du départ des troupes, j’avais été invité à déjeuner cher Herman Mordaunt avec Guert et Dirck, et, en arrivant, je