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elle a pu me faire, et que j’avais à me méfier des baronnets. Mon opinion n’a donc point varié.

Anneke détourna la conversation, et se mit à parler du temps. La saison était précoce, et les grands mouvements de troupes ne pouvaient tarder à commencer. Plusieurs régiments étaient arrivés aux colonies, et l’on y comptait des officiers de distinction. Au nombre de ceux qui venaient de traverser ainsi l’Atlantique pour la première fois, se trouvait lord Howe, jeune militaire qui arrivait précédé d’une grande réputation, et sur lequel on fondait de belles espérances pour la campagne qui allait s’ouvrir. Pendant notre causerie, Herman Mordaunt, qui s’était absenté un moment, rentra, et il m’emmena avec lui pour me faire voir les dispositions qu’il prenait pour le voyage. Il reprit avec moi la conversation où elle en était lorsqu’il était revenu.

— Nouveaux lords, lois nouvelles ; c’est un vieil axiome, Corny, et il paraît que ce M. Pitt, qui est l’âme de la chambre des communes, veut qu’il se vérifie dans toute l’étendue de l’empire britannique. La vie circule enfin dans toutes les artères des colonies, et la période d’assoupissement va cesser avec le commandement de lord Loudon. Le général Abercrombie, vieux militaire dont on attend beaucoup, est maintenant à la tête des troupes royales, et tout fait présager une campagne active et brillante. Il faut que les revers de ces dernières années soient effacés, et que le nom anglais redevienne redoutable sur ce continent. Lord Howe dont parlait Anneke est un jeune officier de mérite ; on dit que le sang de la maison de Hanovre coule dans ses veines ; sa mère n’étant rien moins que la demi-sœur de la main gauche du roi actuel.

Herman Mordaunt parla alors plus en détail de ses projets pour l’été. Il était heureux d’apprendre, me dit-il, que Dirck et moi nous allions être ce qu’il appelait ses voisins, — quoiqu’il résultât de renseignements plus précis que les deux domaines étaient à plus de quatorze milles de distance, et séparés par une grande forêt vierge. Enfin nous serions voisins, dans ce sens qu’il n’y aurait pas d’autres habitants entre nous ; et si les visites devaient être rares, elles seraient longues du moins. Après tout, les voisins porte à porte ne sont pas toujours ceux qui se connaissent le