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plètement beau ; et je puis vous assurer que notre armée sera bien assez forte pour nous protéger contre les Français et les Indiens.

Ai-je besoin de dire avec quel ravissement Guert et moi nous apprîmes cette bonne nouvelle ? Mais elle produisit sur Bulstrode un effet diamétralement contraire. Il ne parut pas surpris de ce projet de voyage ; mais quelques expressions qui lui échappèrent semblèrent témoigner qu’il ne soupçonnait pas que les deux domaines, celui d’Herman Mordaunt et le nôtre, fussent si rapprochés l’un de l’autre. Ce fut même par les questions qu’il adressa que je fus mis au courant de tous les, détails de cette affaire. Il paraît que le voyage d’Herman à Albany avait pour but de prendre quelques dispositions pour cette propriété sur laquelle il avait fait construire plusieurs moulins, et opéré d’autres améliorations, indispensables dans un nouvel établissement, et qui, par suite des progrès et des événements de la guerre, se trouvait plus rapprochée de l’ennemi qu’il n’eût été à désirer. Même dans la position occupée par les Français, à Ticonderoga, ses moulins, en particulier, pouvaient paraître courir quelques dangers, quoique la distance fût au moins de quarante milles ; car des détachements de sauvages, conduits par des blancs, franchissaient souvent cette distance à travers les forêts, pour détruire un établissement et pour commettre des déprédations. Mais l’ennemi avait traversé le lac George l’été précédent, et s’était emparé du fort William Henry, situé à l’extrémité méridionale de ce lac. Il est vrai que là s’était arrêtée l’invasion ; que l’ennemi avait même abandonné son audacieuse conquête, et qu’il s’était replié sur Ty et Crown-Point, deux des positions militaires les plus fortes des colonies anglaises. Cependant Ravensnest (le Nid des Corbeaux), c’était le nom du domaine d’Herman Mordaunt, n’était pas assez éloigné pour être à l’abri de toute sortie ; et, en venant établir sa résidence à Albany, le but avoué d’Herman était d’être près du théâtre des événements, et de pouvoir en observer la marche. S’il avait quelque mission politique, c’était un profond mystère. Il était survenu un nouvel incident qui avait pu décider aussi le propriétaire de cette concession à la visiter. Les quinze ou vingt familles qu’il était parvenu à y éta-