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New-York sur l’article de la religion ; tandis qu’au contraire chez nos voisins la religion était toujours en évidence. Un certain colonel Heathcote, Anglais comme lui d’origine, révolté de voir que nous n’étions guère que des païens, raconta à mon grand-père l’expédient qu’il avait imaginé pour réveiller un peu le sentiment religieux. Commandant la milice de la colonie, il donna ordre aux capitaines des différentes compagnies de réunir leurs hommes tous les dimanches au point du jour, et de leur faire faire l’exercice sans interruption jusqu’au soir, à moins qu’ils ne consentissent à aller entendre l’office du matin et du soir, et deux bons sermons dans la journée ; expédiant qui réussit à merveille.

Mais tout ce bavardage m’entraîne loin de mon histoire, et il est temps d’y revenir.


CHAPITRE II.


Je voudrais qu’il n’y eût point d’âge entre dix et vingt-trois ans, ou que l’intervalle s’écoulât en dormant.
Shakspeare



Je ne dirai pas grand’ chose des quatorze premières années de ma vie. Elles se passèrent comme celles de la plupart des fils de bonne famille de notre colonie. Il y avait chez nous une classe, peu nombreuse il est vrai, et composée en grande partie de propriétaires d’origine hollandaise, qui se contentait de l’éducation indigène et qui n’envoyait presque jamais ses enfants en Angleterre pour compléter leur instruction. Ce sont des préjugés qui commencent, me dit-on, à s’affaiblir ; et l’on pourrait bien ne pas tarder à croire qu’Oxford et Cambridge sont des universités qui valent bien celle de Leyde ; mais dans mon enfance une pareille opinion eût été une monstruosité aux yeux de tous les