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— Sans doute les dames d’Albany sont d’une beauté remarquable, monsieur Ten Eyck ? demandai-je à mon compagnon, voulant dire quelque chose d’agréable à un homme qui montrait tant d’empressement à me servir. Les échantillons que j’ai pu voir ce matin, en traversant la rivière, m’en ont donné l’idée la plus favorable.

— Mon cher monsieur, nous n’avons pas à nous plaindre ; nos dames, en général, sont charmantes, pleines de grâces et d’amabilité ; mais il en est arrivé une cet hiver de la partie de la colonie que vous habitez, dont l’approche seule serait capable de faire fondre les glaces de l’Hudson !

Mon cœur battit plus vite, car je ne connaissais qu’une personne qui pût produire une sensation semblable.

— Elle est donc de New-York, monsieur Ten Eyck ? m’aventurai-je à demander.

— Sans doute, mon cher. Le voisinage de l’armée nous vaut la présence de quelques beautés anglaises ; mais il n’est colonel, major ni capitaine qui en ait amené de comparables à celles qui accompagnent Herman Mordaunt. Peut-être ce nom ne vous est-il pas inconnu ?

— Nullement, monsieur. Herman Mordaunt est même le parent de Dirck Follock, mon ami, que voici.

— Ma foi, M. Follock est un heureux mortel de pouvoir appeler sa cousine une personne aussi ravissante qu’Anneke Mordaunt.

— Oh ! oui, monsieur ! m’écriai-je vivement ; Anneke Mordaunt est la plus jolie fille de l’York.

— Doucement, je ne vais pas aussi loin, reprit Guert en modérant son enthousiasme d’une manière qui me surprit, bien qu’un vif sentiment d’admiration se peignît toujours sur sa belle figure ; miss Mordaunt est très-bien, j’en demeure d’accord ; mais il y a avec elle une miss Mary Wallace qui fait tout autant de sensation à Albany.

Mary Wallace ! Jamais il ne me serait venu à l’idée de comparer la pensive, la silencieuse Mary, malgré toutes ses perfections, à Anneke Mordaunt. Ce n’était pas qu’elle ne fût très-agréable. Elle était même jolie, et sa figure avait une expression