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prochant des idoles, avaient reconnu qu’elles avaient été faites par des mains mortelles.

Avec le renouvellement de la guerre, reparut l’usage de presser des matelots sur mer, même à bord de bâtiments neutres ; et tous les navires américains avaient grand soin d’éviter les croiseurs qui pouvaient leur enlever leurs équipages. Quelque étrange que cela puisse paraître, il se trouvait des Américains, parmi les plus influents, qui justifiaient cette prétention des Anglais, quoiqu’elle s’exerçât au détriment des bâtiments de leur propre pays. Quelle cause ne défendrait-on pas, quand on est aveugle ou excité par l’esprit de parti ? Comme il en résultait que tout marin était Anglais, s’il ne pouvait prouver, au milieu de l’océan, à trois cents lieues peut-être de la terre, qu’il était Américain, les officiers de la marine anglaise exerçaient sur des étrangers naviguant sous pavillon étranger une juridiction qui ne serait pas tolérée de la part du lord grand chancelier d’Angleterre lui-même, dans une des rues de Londres ; l’obligation de prouver son innocence, incombant à l’accusé. Il y avait une foule d’autres principes non moins évidents, non moins incontestables, qui étaient violés tous les jours dans l’application de ce système de presse ; mais on n’en voyait pas moins des membres du congrès, des publicistes éminents, soutenir avec ardeur le droit des Anglais. L’esprit de parti est-il donc complètement incompatible avec l’usage de la raison ?

Je puis dire, sans trop de vanité, que j’ai su me tenir constamment en dehors de ces exagérations. Mon père avait été fédéraliste, mais de nombreux voyages en pays étrangers l’avaient considérablement refroidi, et jamais on n’avait cherché à me faire croire que le jour était la nuit dans l’intérêt de tel ou tel parti. Je savais que pour exercer le droit de presse sur des bâtiments étrangers hors des eaux de la Grande-Bretagne, on ne pouvait invoquer d’autre argument que celui de la force ; et quant aux denrées coloniales, et à toutes les chicanes auxquelles pouvait donner lieu leur transport, je pensais que des neutres avaient parfaitement le droit d’acheter à l’une des nations belligérantes pour vendre à une autre, pourvu qu’ils trouvassent leur intérêt à le faire, et à condition de ne violer aucun blocus réel, et de ne transporter rien de ce qu’on appelle contrebande de guerre.

Je n’en résolus pas moins de suivre l’avis du pilote, et de faire