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la mort de sa cousine, racontant mille petits incidents pour montrer combien mistress Bradfort lui était attachée, et quelle excellente dame c’était ; mais pas un mot ne fut dit du testament. Je dus, à mon tour, achever le récit de mon dernier voyage, que je n’avais pu compléter au spectacle. Quand Lucie apprit que le rude marin qui se trouvait à bord du sloop était Marbre, elle regretta vivement de ne l’avoir pas su, et d’avoir manqué cette occasion de faire sa connaissance. Le nom de Rupert ne fut pas prononcé une seule fois entre nous ; et, lorsque nous arrivâmes à la maison, il me sembla qu’un sentiment assez semblable à l’intérêt que je lui avais inspiré autrefois s’était réveillé dans le cœur de Lucie.

Chloé l’attendait à la porte, pour lui dire que miss Grace désirait voir miss Lucie seule. Je redoutais cette entrevue, et j’aurais voulu y assister ; mais Lucie me dit de me fier à elle, et il fallut céder.

Pendant qu’elle se rendait chez ma sœur, je cherchai le docteur et j’eus avec lui une courte conférence. Je lui dis que Grace était restée beaucoup trop seule, que la douleur l’avait minée sourdement, et je lui donnai à entendre que des peines morales étaient la cause première de sa maladie. Post était un homme froid, réservé, qui ne disait rien avant d’avoir vu son malade, mais qui observait tout, faisait son profit de tout, et, tant que je parlai, son œil perçant resta fixé sur ma figure.

Il se passa plus d’une heure avant que Lucie reparût. Rien qu’à la voir, il était facile de reconnaître qu’elle avait éprouvé la plus vive émotion, et qu’elle ne s’était pas attendue encore à trouver Grace dans un pareil état. Ce n’était pas que la maladie, sous aucune de ses formes connues, fût très-apparente ; mais ma sœur, toujours si délicate, avait alors un teint si transparent, une expression si céleste dans les yeux, et quelque chose de si impalpable en quelque sorte dans toute sa personne, qu’on eût dit qu’elle appartenait déjà à un autre monde.

Le docteur retourna avec Lucie à la chambre de ma sœur, où il resta près d’une heure, aussi longtemps, me dit-il, qu’il crut pouvoir le faire sans fatiguer la malade. Il fut très-réservé dans ce qu’il nous dit. Il prescrivit certains toniques, nous recommanda de chercher à distraire doucement ma sœur des idées qui l’occupaient péniblement. Il était aussi d’avis qu’un changement de lieu pourrait être favorable, si on pouvait le faire sans trop de fatigue. Je proposai aussitôt le Wallingford ; c’était un sloop d’une petite dimension, il est vrai ; mais il avait deux chambres très-convenables, dont l’une avait été construite par mon père pour les voyages que ma mère faisait quelquefois à New-York. Dans cette saison de l’année, le sloop ne faisait