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peu plus d’un an. Son nom était l’Aurore, et une figure de la déesse servait d’ornement à sa proue.

Le résultat de mon examen et des renseignements que je pris fut favorable, et à la fin de la semaine l’Aurore était achetée. Les armateurs de la Crisis voulurent bien me témoigner leurs regrets de ne pas me voir en conserver le commandement ; mais personne ne pouvait trouver mauvais que je songeasse à naviguer pour mon propre compte. Je fis cette acquisition importante à l’époque peut-être la plus favorable pour la navigation américaine. La preuve, c’est que le jour même où je fus mis en possession du bâtiment, on vint m’offrir de très-bons chargements pour quatre points du monde différents. J’eus à choisir entre la Hollande, la France, l’Angleterre et la Chine. Après avoir consulté mon tuteur, je me décidai pour la France. Il y avait plus d’argent à gagner, et je verrais un nouveau pays. Le voyage de Bordeaux, aller et retour, ne me prendrait que cinq mois. Alors, je serais majeur, et par conséquent mon maître. Comme j’avais l’intention de donner de grandes fêtes à Clawbonny à cette occasion, il ne fallait pas trop m’éloigner. J’engageai donc pour lieutenants Talcott et le Philadelphien qui s’appelait Walton, et nous commençâmes notre chargement.

Dans l’intervalle, je résolus d’aller rendre une visite au toit paternel. C’était la saison où l’on quittait la ville en masse pour aller habiter les villas qui s’élèvent sur les bords de l’Hudson. M. Hardinge était impatient aussi de rejoindre son troupeau. Lucie et Grace commençaient à se fatiguer du séjour de la capitale, qui devenait assez monotone ; et tout le monde, Rupert excepté, soupirait après la campagne. J’avais invité M. Merton à passer une partie de l’été à la ferme, et il était plus que temps de renouveler mes instances ; car le médecin du major trouvait que son malade avait besoin de quitter les rues enfermées de New-York pour aller respirer le grand air. Émilie semblait si bien dans son élément au milieu de la société dans laquelle elle était lancée depuis son arrivée, société supérieure en général à celle qu’elle fréquentait en Angleterre, que je fus surpris de l’empressement avec lequel elle me seconda auprès de son père.

— M. Hardinge dit que Clawbonny est vraiment un joli endroit, et que l’air y est excellent. Il nous faut encore plusieurs mois pour recevoir des nouvelles d’Angleterre, et nous avons déjà tant d’obligations au capitaine Wallingford, et il nous invite de si bonne grâce, que nous n’avons presque plus à craindre d’être indiscrets en acceptant.

Le major parut aussi surpris que moi de ce langage d’Émilie, mais