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qui est strictement vrai, en évitant les extravagances, en peignant avec fidélité, et, comme aurait dit notre ami Marbre, en généralisant avec une certaine mesure.

Les États-Unis, depuis le commencement de ce siècle, ont éprouvé des changements importants. Quelques-uns de ces changements ont été des améliorations ; d’autres, à mon avis, tout le contraire. Ce dernier fait ne peut être connu que par ouï-dire de la génération qui entre dans la vie sociale, et les pages suivantes pourront jeter quelque jour sur la double face de la question, en présentant les choses telles qu’elles étaient. La population de la République s’élève aujourd’hui à plus de dix-huit millions d’âmes ; en 1800, elle n’était guère de plus de cinq millions. De six cent mille âmes, la population de l’État de New-York s’est élevée à deux millions sept cent mille. En 1800, la ville de New-York avait soixante mille habitants ; aujourd’hui, en comprenant Brooklyn et Williamsburg qui alors, à vrai dire, n’existaient pas, elle en compte au moins quatre cent mille. Ces changements numériques sont prodigieux, et ils ont produit des changements d’une autre sorte. Quoiqu’une augmentation de nombre n’implique pas nécessairement un plus haut degré de civilisation, on doit raisonnablement s’attendre à une grande amélioration dans les usages ordinaires de la vie. Tel a été le résultat ; et pour ceux qui connaissent l’État actuel des choses, les pages suivantes feront probablement ressortir la différence.

Quoique l’amélioration morale dans la société américaine n’ait pas marché même de pair avec celle qui est purement matérielle, il y a cependant des points essentiels sur lesquels elle a été évidente. De toutes les possessions britanniques sur le continent d’Amérique, l’état de New-York, après avoir été conquis sur les Hollandais, reçut en grande partie l’organisation sociale de la métropole. Même sous les Hollandais, il avait imité quelques-unes des particularités caractéristiques de ses patrons. Sans doute quelques colonies du sud avaient leurs caciques et leur noblesse demi-féodale, demi-sauvage, mais ce système dura peu ; l’excentricité de cette portion du pays provenant surtout de l’existence de l’esclavage domestique sur une large échelle. À New-York, c’était différent. Colonie conquise, elle conserva l’empreinte des institutions de la métropole plus profondément gravée qu’aucun des établissements qui commencèrent par des concessions accordées à des propriétaires, ou en vertu de chartes émanées de la couronne. C’était strictement, et ce fut toujours une colonie royale, jusqu’à l’heure de la séparation. Les conséquences sociales de cet état de choses se manifestèrent dans les habitudes de ses habitants