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toutes les baies qui se trouvent le long des côtes de la Calabre. J’avais dit à Nelson qu’il me fallait deux bâtiments ; car, aussi sûr que ce Roule — Raw owl… comment diable nommez-vous ce pirate, Griffin ?

— Raoul, capitaine ; Raoul Yvard. C’est un nom tout à fait français. Raoul signifie Rodolph.

— Eh bien ! je dis à Nelson que si ce drôle se met à tourner sans cesse autour d’une île, autant vaudrait jouer aux quatre coins toute la journée que d’essayer de lui faire prendre le large pour lui donner la chasse. Il manœuvre son lougre comme un conducteur de diligence fait tourner sa voiture dans la cour d’une auberge.

— Je suis surpris que Sa Seigneurie n’y ait pas fait attention, et ne nous ait pas donné une corvette ou deux pour nous aider.

— Oui, comptez là-dessus de la part de Nelson ! il pourrait envoyer un bâtiment anglais à la poursuite de deux français ; mais du diable s’il songe jamais à faire donner la chasse à un bâtiment français par deux anglais.

— Mais il ne s’agit pas d’un combat, capitaine ; ce n’est qu’une chasse, et un français courra toujours plus vite que deux anglais.

Raoul proféra de dépit, entre ses dents, un gros jurement qui ne fut entendu que du vice-gouverneur, qui, de tous les interlocuteurs, était celui qui se trouvait le plus près du jeune corsaire.

— Cela est vrai, répondit Cuff, mais ce que je dis ne l’est pas moins. On nous a fait partir seuls, et si ce Fiou-Folly se jette entre Ischia et Procida, il serait plus facile de faire sortir un renard de son terrier que de l’en chasser sans aide. — Quant à une attaque par des canots, je pense que vous en avez tous eu assez.

— Je crois réellement, capitaine, que notre équipage est un peu découragé, répondit Griffin avec la franchise et la simplicité d’un homme vraiment brave. Il faut lui donner le temps d’oublier la dernière escarmouche, avant d’en exiger un nouveau service du même genre.

— Bon ! murmura Raoul ne faisant pas attention qu’on pouvait l’entendre.

— Et pourtant, Griffin, il faut que nous le prenions, quand nous devrions user nos souliers à cette chasse.

Pendant tout ce temps, Andréa Barrofaldi et Vito Viti ne comprenaient pas un mot de l’entretien des deux officiers anglais ; mais Raoul les écoutait avec soin et entendait parfaitement tout ce qu’ils disaient. Jusqu’à ce moment, le vice-gouverneur avait été assez indifférent et inattentif à tout ce qui se passait ; mais les deux exclamations de Raoul avaient éveillé dans son esprit quelques soupçons