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sion d’un bâtiment qui, sur une eau tranquille, est le plus fin voilier de toute la Méditerranée, et qui nous rendrait de grands services. Nous pensons que la Proserpine aurait l’avantage sur lui par une bonne brise ; mais, par un temps modéré, le Feu-Follet filera six nœuds contre nous cinq. Or, si vous faites feu sur ce bâtiment, ou il s’échappera, où il sera coulé à fond, car Raoul Yvard n’est pas homme à amener son pavillon par crainte des batteries d’une ville. Tout ce que je vous demande, c’est que vous me permettiez de faire des signaux cette nuit, — j’ai tout ce qu’il me faut pour cela, dès que je croirai la frégate assez près pour les voir, — et que vous apportiez tous les délais et obstacles possibles à son départ jusqu’à demain. Nous vous répondons du reste.

— Je ne crois pas qu’il y ait grand risque que le lougre mette à la voile cette nuit, signor tenente ; son commandant nous a à peu près annoncé l’intention de passer quelques jours avec nous, et c’est précisément cette confiance qui me porte à croire qu’il ne peut être le corsaire pour lequel vous le prenez. Pourquoi Raoul Yvard et le Feu-Follet seraient-ils entrés dans ce port ?

— Qui peut le savoir ? C’est l’habitude de cet homme, et sans doute il a ses raisons pour cela. On dit qu’il est entré jusque dans Gibraltar. Un fait certain, c’est qu’il a intercepté plusieurs bâtiments de nos convois ayant de bonnes cargaisons, qui s’y rendaient. Je vois qu’il y a dans votre havre un bâtiment autrichien qui prend un chargement de fer. Peut-être attend-il qu’il l’ait terminé ; et il trouve plus commode de rester à l’ancre ici, que de le guetter en courant des bordées au large.

— Vous autres marins, vous avez des manières qui ne sont connues que de vous, et tout ce que vous venez de dire est possible. Mais tout cela me semble une énigme. — Avez-vous d’autres preuves de ce que vous êtes, signor tenente, que la commission que vous venez de me faire voir ? Car sir Smit, — comme j’ai coutume d’appeler le commandant de ce lougre, — m’en a montré une qui a l’air aussi authentique que la vôtre, et il porte un uniforme qui paraît anglais. Comment puis-je juger entre vous deux ?

— Cette difficulté a été prévue, signor vice-gouverneur, et j’arrive nanti de toutes les preuves nécessaires. J’ai commencé par vous montrer ma commission, parce que l’absence de cette pièce pourrait rendre toutes les autres suspectes. Maintenant en voici une autre, émanée des autorités supérieures de Florence, qui nous recommande à la protection et aux bons offices des gouverneurs de tous les ports de la Toscane. Elle est écrite en italien et vous la comprendrez