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voir avertir les bâtiments qui s’approchent de la côte ; et si monsieur Wychecombe, qui est plus jeune et plus leste que moi, veut courir à la maison pour allumer cette mèche, pendant ce temps je mettrai l’amorce, et dans une minute nous leur ferons savoir où ils sont.

L’amiral consentit sur-le-champ à cette proposition, et l’on s’empressa de l’exécuter. Le lieutenant s’empressa de courir chez Dutton pour allumer la mèche, enchanté de trouver cette occasion de savoir comment Mildred se trouvait, et celui-ci, ouvrant un petit caisson qui était près du canon, y prit une corne d’amorce, et prépara tout pour tirer un coup de canon. Wychecombe ne fut absent qu’une minute, et lorsque tout fut prêt, il regarda l’amiral, comme pour attendre le signal.

— Faites feu, monsieur Wychecombe, dit sir Gervais en souriant ; cela réveillera Bluewater ; et peut-être nous honorera-t-il d’une bordée en forme de réplique.

La mèche fut appliquée à l’amorce, et le coup partit. Une bonne minute après, le brouillard parut se lever autour du César, vaisseau qui portait le pavillon du contre-amiral ; un éclair brilla à travers les vapeurs, et l’on entendit ensuite la détonation d’une pièce de gros calibre. Presque au même instant trois petits pavillons se montrèrent au haut du grand mât du César ; car, avant de quitter son bord, sir Gervais avait envoyé un message à son ami pour le charger de veiller sur toute la flotte. C’était le signal de mouiller. L’effet qui en résulta, vu du haut du promontoire, était frappant. On n’avait pas encore aperçu la coque d’un seul vaisseau ; le brouillard continuait à être abaissé sur l’eau, de manière à cacher les basses vergues. Au-dessus, tout était brillant, distinct, et à assez peu de distance pour qu’il fût presque possible de distinguer les personnes. Jusqu’à ce point, tout était visible, tandis qu’en dessous, tout semblait couvert d’un mystère surnaturel. Chaque vaisseau avait un officier sur le grand-hunier pour surveiller les signaux ; et dès que le César eut montré ses trois pavillons, qui avaient été depuis longtemps préparés pour ce service, et suspendus en boules, on vit flotter le pavillon d’attention au haut des mâts de chaque vaisseau. Alors commença un spectacle encore plus curieux que celui qu’on regardait avec intérêt depuis si longtemps du haut du promontoire. Les cordages commencèrent à se mouvoir, et les voiles à se dessiner en festons, en apparence sans le secours des mains. Ayant l’air d’être privés de communication avec l’Océan et avec le corps des bâtiments, tous les mâts semblaient être doués de vie, chacun jouant son rôle indépendamment des autres, et tous tendant pourtant au même but. En quelques minutes, les voiles