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la ferme conviction que vous ne pourriez manquer de venir à mon aide.

Bluewater regarda son ami avec attention, et un sourire de satisfaction anima sa physionomie, en entendant ce qu’il lui disait avec l’accent de chaleur et de franchise qui lui était naturel.

— Je crois véritablement que vous me connaissez mieux que je ne me connais moi-même, dit Bluewater après un instant de réflexion ; oui, vous me connaissez mieux. Et pourtant, Oakes, quelle fin glorieuse aurait eue ma carrière dans notre profession, si je vous eusse suivi au combat suivant notre ancienne coutume, et que j’eusse succombé dans vos eaux, en suivant votre exemple !

— Il vaut mieux que les choses se soient passées ainsi, Dick, si l’on peut appeler bien ou mieux ce qui a eu une fin si déplorable ; oui, il vaut mieux que les choses se soient passées ainsi. N’avez-vous pas succombé presque à mon côté ? Il ne faut plus ni en parler, ni y penser.

— Nous avons été longtemps amis, et amis intimes, Gervais, reprit Bluewater, tirant un bras hors du lit, et étendant une main pour presser celle du vice-amiral, et je ne puis me rappeler une seule occasion où vous ayez manqué de justice ou d’affection à mon égard.

— Que Dieu me pardonne si j’en ai jamais manqué, Dick. Mais j’espère qu’il n’en est rien ; je l’espère sincèrement, car je serais très-affligé d’avoir à croire le contraire.

— Vous n’avez aucun motif pour vous rien reprocher. Vous ne pouvez avec justice vous accuser d’une seule action, d’une seule pensée tendant à me nuire. Je mourrais plus heureux si j’en pouvais dire autant, Oakes.

— Action, pensée, Dick ! Jamais vous n’avez rien fait, rien médité dans tout le cours de votre vie qui pût me préjudicier en la moindre chose. Votre affection pour moi est au contraire la véritable cause qui fait que vous êtes dans la situation où vous vous trouvez en ce moment.

— Il est agréable de voir que j’ai été compris. Je vous dois beaucoup de reconnaissance, Oakes, de vous être abstenu de me faire un signal pour m’appeler à vous avec ma division, comme je vous en avais fait la sotte demande si mal à propos. Mais je souffrais alors une angoisse d’esprit près de laquelle les angoisses physiques causées par ma blessure sont un élysée. Vous m’avez ainsi donné le temps…

— D’écouter la voix de votre cœur qui vous conseillait de faire ce