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— Allons, allons, en voilà assez sur ce sujet. — Il est possible que M. Thomas Wychecombe ne soit pas fils légitime de son père, je suis même porté à croire qu’il ne l’est pas, d’après les preuves qu’en a données sir Reginald depuis un jour ou deux ; et j’entends dire que sa propre mère est mécontente de lui, ce qui donnera le coup d’assommoir à ses prétentions. Quoi qu’il en soit, Milly, Tom Wychecombe a un bon revenu de six cents livres, dont il a hérité de son père, et sir Reginald lui-même convient que tous les biens mobiliers du feu baronnet doivent lui appartenir, en vertu du testament.

— Vous oubliez, mon père, dit Mildred qui savait que ce qu’elle allait dire était la seule chose qui pût faire quelque impression sur son père, que M. Thomas a promis de payer les legs que feu sir Wycherly avait faits par le second testament que la mort l’a empêché de signer.

— Ne comptez pas trop sur cela, Mildred ; mais j’ose dire que sur les vingt mille livres qui doivent lui revenir, il vous en donnerait demain dix mille à titre de douaire, si vous consentiez à l’épouser. Mais partons maintenant de ce nouveau baronnet, — car il paraît devoir hériter du titre comme du domaine, — vous a-t-il jamais fait une offre de mariage ?

Il s’ensuivit une pause, pendant laquelle Wycherly crut entendre le bruit de la respiration pénible de Mildred ; et sa conscience lui dit qu’il ne pouvait honorablement rester plus longtemps dans la situation où il se trouvait. Se levant à la hâte il monta rapidement le sentier qui conduisait au pavillon d’été. Un léger cri échappa à Mildred quand elle entendit le bruit de ses pas ; et quand il arriva, il la trouva le visage appuyé sur ses deux mains, tandis que Dutton s’avançait en chancelant, d’un air surpris et alarmé. Comme les circonstances ne permettaient pas au jeune lieutenant d’avoir l’air d’ignorer ce qui venait de se passer entre eux, il mit à l’écart toute réserve, et parla clairement et avec franchise.

— Monsieur Dutton, dit-il, j’ai entendu, sans le vouloir, une partie de la conversation que vous venez d’avoir avec Mildred, et je puis répondre moi-même à la dernière question que vous lui avez faite. — Oui, j’ai offert ma main à votre aimable fille. — Je lui renouvelle cette offre en ce moment. Elle me rendrait l’homme le plus heureux de l’Angleterre en l’acceptant, mais elle l’a refusée.

— Refusée ! s’écria Dutton, la surprise faisant disparaître l’air d’aménité qu’il avait pris en voyant Wycherly. — Refusée ! — C’était donc, sir Wycherly Wychecombe, avant que vos droits fussent aussi bien établis qu’ils le sont à présent ? — Répondez-moi, Mildred ;