de sa ligne firent servir et firent voile comme pour aller à la rencontre de cette division, manœuvrant pour tâcher de lui passer au vent, tandis que les cinq autres avec l’Éclair, ayant encore leurs huniers sur leurs mâts, attendaient que l’ennemi arrivât. Sir Gervais ne put y résister plus longtemps, il résolut d’obliger Bluewater à se décider, s’il était possible, et donna ordre que le Plantagenet mît le vent dans ses voiles. Suivi par toute sa division, il vira sur-le-champ vent arrière et s’avança vers l’arrière-garde de M. de Vervillin, sous petites voiles, laissant porter en dépendant seulement un peu sur l’amiral français, afin d’éviter une bordée d’enfilade.
Le quart d’heure qui suivit fut un intervalle de temps plein d’intérêt et de changements importants, quoique pas un coup de canon ne fut tiré. Dès que le comte de Vervillin s’aperçut que les Anglais se disposaient à s’approcher, il fit le signal à sa division de laisser arriver vent arrière sous leurs huniers, en commençant le mouvement par le vaisseau de queue, ce qui forma l’ordre de sa ligne en sens contraire, et mit l’Éclair à la queue, c’est-à-dire le plus près de l’ennemi. Dès que cela fut fait, il fit amener tous les huniers sur le ton. On ne pouvait se tromper à cette manœuvre. C’était faire à sir Gervais une invitation à venir l’attaquer bord à bord, car elle ne lui laissait aucun risque d’une bordée d’enfilade en s’approchant. Le commandant en chef anglais n’était pas homme à refuser un défi si palpable, et ayant fait quelques signaux à ses vaisseaux pour leur indiquer le genre d’attaque qu’il méditait, il établit sa misaine et son grand perroquet, et laissa porter vent arrière. Les vaisseaux qui le suivaient en firent autant ; et personne ne douta que le mode d’attaque ne fût déterminé pour cette journée.
Comme les Français étaient encore à un demi-mille au sud-est de la division ennemie qui s’approchait, le comte de Vervillin réunit toutes ses frégates et corvettes a tribord, laissant ainsi à sir Gervais le champ libre pour s’approcher par son travers de bâbord. Le vice-amiral anglais comprit cette manœuvre, et le Plantagenet dirigea sa route de manière à se placer de ce côté de l’Éclair, à la distance d’environ soixante brasses. Cela menaçait d’un combat de près ce qui n’était pas ordinaire aux flottes à cette époque ; mais c’était la partie que notre commandant en chef aimait à jouer, et c’était aussi ce qui promettait d’amener le plus tôt la fin de l’affaire.
Ces préliminaires arrangés, les deux commandants en chef eurent encore le temps de la réflexion. Les Français étaient encore à un bon mille en tête de leurs ennemis, et comme les deux flottes faisaient même route, l’approche des Anglais était si lente, qu’on vit durer