Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 20, 1843.djvu/36

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tions entre l’Europe, et l’Amérique, il était Américain, comme il était Virginien en Amérique en tout ce qui concernait les relations de la Virginie avec les autres colonies. Il avait compris le sarcasme mal déguisé de Tom, mais il avait étouffé son ressentiment par égard pour le baronnet, et peut-être aussi par suite de l’influence qu’exerçaient sur lui les sentiments d’une nature plus douce auxquels il venait de se livrer.

— Ceux qui sont disposés à penser ainsi des colonies, répondit-il d’un ton calme, feraient bien d’aller voir cette partie du monde avant d’exprimer trop haut l’opinion qu’ils en ont, de peur de dire quelque chose que leurs propres observations leur feraient ensuite désirer de rétracter.

— Cela est vrai, mon jeune ami, dit le baronnet avec les meilleures intentions possibles, très-vrai, vrai comme l’Évangile. Nous n’entendons rien aux choses que nous ne connaissons pas, maître Dutton ; c’est une vérité que nous devons admettre, nous autres vieillards, et je crois que Tom en conviendra aussi. Il serait déraisonnable de s’attendre à trouver tout en Amérique aussi confortable qu’en Angleterre, et je ne suppose pas qu’en général les Américains pussent gravir un rocher comme un Anglais. Quoi qu’il en soit, il y a des exceptions à toutes les règles, comme mon pauvre frère Jacques avait coutume de dire quand il trouvait quelque chose à reprendre au sermon d’un évêque. Je crois que vous n’avez pas connu mon frère Jacques, Dutton ; il doit être mort à peu près à l’époque de votre naissance. J’avais coutume de l’appeler saint Jacques, quoique mon frère Thomas, le juge, père de Tom que voilà, prétendît qu’il était saint Jacques le Mineur.

— Je crois du moins, sir Wycherly, répondit Dutton, que le révérend M. Wychecombe était mort avant que je fusse assez âgé pour pouvoir me rappeler ses vertus. Mais j’ai souvent entendu mon père parler avec respect de toute votre honorable famille.

— Oui, Dutton votre père était procureur dans la ville voisine, et nous le connaissions tous parfaitement. Vous avez eu raison de venir passer le reste de vos jours parmi nous ; on n’est jamais si bien nulle part que sur sa terre natale, surtout quand cette terre est l’Angleterre et le Devonshire. Vous n’êtes pas un de nous, jeune homme, quoique vous vous nommiez Wychecombe ; mais personne n’est responsable de sa naissance, ni du lieu de sa naissance.

Cette vérité incontestable, qui est dans des milliers de bouches, et qui ne se trouve presque dans aucun cœur, sir Wicherly la disait dans de bonnes intentions, quoiqu’il l’exprimât simplement. Tout ce