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je désire en examiner la mâture. — Damnation ! — Personne ne jurait que sir Gervais dans la barge du vice-amiral. — Ce Magrath est un infernal drôle, précisément l’homme qu’il faut pour faire entrer une pareille idée dans la tête du chapelain.

— Je crois que vous avez plus d’à moitié raison, sir Gervais, car j’ai entendu une conversation qu’ils avaient ensemble pendant une nuit sombre, et le chirurgien-major établissait une théorie fort semblable à celle dont il s’agit.

— Ah ! oui-dà ! cela est bien digne de l’impudent Écossais qui voulait me persuader qu’on avait eu tort de saigner votre pauvre oncle, sir Wycherly, dans un cas d’apoplexie aussi clair qu’on en vit jamais.

— Eh bien ! je n’aurais pas cru qu’il eût porté l’impudence si loin, dit le capitaine, dont les connaissances en médecine étaient de niveau avec celles du vice-amiral ; je n’aurais pas cru qu’un docteur osât soutenir une telle doctrine. Quant au chapelain, j’entendis Magrath lui établir en principe que la religion et la médecine ne pouvaient jamais marcher d’accord. La religion, disait-il, était un — altératif — qui neutraliserait un sel aussi vite que le feu.

— Ce Magrath est un grand vagabond, quand il s’empare de l’esprit d’un blanc-bec. Je voudrais de tout mon cœur qu’il fût près du Prétendant avec deux ou trois livres de ses drogues favorites. — Je crois que l’Angleterre pourrait y gagner quelque chose. — Il me semble, Wycherly, que le Blenheim se comporterait mieux par un mauvais temps, si sa mâture était raccourcie au moins de deux pieds.

— Cela peut être, sir Gervais ; mais serait-ce un vaisseau sur lequel on pourrait aussi bien compter pour se présenter à l’action pendant des vents légers et dans des moments critiques ?

— Hum ! il est temps que nous autres vieux marins nous regardions autour de nous, eh ! Greenly ? quand des enfants commencent à raisonner sur une ligne de bataille. Ne rougissez pas, Wychecombe, ne rougissez pas ; votre remarque est sensée, et elle prouve que vous réfléchissez. Nul pays ne peut avoir une marine puissante, une marine qui ait une grande influence dans ses guerres, s’il ne fait une grande attention à la tactique des escadres. Vos actions de frégate à frégate, de vaisseau à vaisseau, sont bonnes comme exercice ; mais la grande pratique doit s’apprendre dans une escadre. Dix vaisseaux de ligne, marchant en escadre et tenus en mer, feront plus que cent croiseurs pour établir et maintenir la discipline, et ce n’est qu’en employant des vaisseaux ensemble qu’on découvre ce que des vaisseaux et des hommes peuvent faire. Nous devons le succès de cette journée à notre pratique de marcher en ligne serrée, sans quoi jamais