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revint promptement au vent et arriva près de la hanche sous le vent du Plantagenet. Les deux bâtiments étant au plus près, il était facile de les bien gouverner ; et avec de bons timonniers il aurait été possible, malgré la grosse mer, de se rapprocher, sans crainte d’avaries, à environ six brasses l’un de l’autre. Mais il n’était pas nécessaire de se rapprocher autant, le boute-hors et l’homme suspendu à son extrémité projetant à plus du double de cette distance en dehors de la frégate. C’était pourtant une manœuvre délicate, et tandis que l’homme suspendu était encore à trente ou quarante pieds de la ligne perpendiculaire, il fit un signe pour attirer l’attention de ceux qui étaient sur le pont du Plantagenet, fit tourner en l’air une glaine d’une ligne qu’il tenait en main, et dès qu’il vit des mains levées pour la recevoir, il la lança. Un lieutenant de vaisseau attrapa ce petit cordage et embraqua le mou sur-le-champ. Son but étant alors bien compris, une douzaine d’hommes saisirent le bout de cette ligne pour la bien roidir, et, à un signal mutuel, on amena du Druide l’homme suspendu, à mesure que, du Plantagenet on halait sur la ligne. L’homme, descendant ainsi obliquement se dégagea de la chaise qu’il s’était faite avec la bouline du hunier, et sauta sur le pont dès qu’il fut assez près. Se secouant alors, pour s’affermir sur ses jambes, il ôta sa casquette et salua le vice-amiral, qui vit Wycherly Wychecombe sur sa dunette.



CHAPITRE XXIV.


Ne pleure pourtant pas. — La lutte n’est pas finie, ô vainqueur de Philippes ! Plus d’un champ de bataille a produit pour nous des palmes. — Encore un effort : il faut qu’un combat sérieux scelle notre destin.
Mistress Hemans



Les matelots du Plantagenet, qui, en voyant un homme suspendu au bout du boute-hors d’une bonnette, avaient oublié la discipline au point de monter dans le gréement sur les dromes et sur les canons, pour attendre ce qui allait en résulter, ne virent pas plutôt l’étranger descendu en sûreté sur la dunette, qu’ils agitèrent en l’air leurs chapeaux et leurs bonnets, et l’accueillirent, comme d’une seule voix, par des acclamations. Les officiers sourirent de cet élan d’enthousiasme, et l’infraction à la coutume fut oubliée ; la discipline rigide, même d’un bâtiment de guerre, cédant quelquefois à l’impulsion soudaine d’un sentiment naturel.