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— Cela est assez vrai, Monsieur ; cependant j’aurais préféré rejoindre le prince à son débarquement, n’ayant à lui offrir qu’une épée sans tache, plutôt que d’y arriver ayant une armée sur mes talons.

— Quoi ! quand même cette armée vous suivrait avec joie, et aurait le même zèle que vous pour le service de son souverain ?

— Cela pourrait changer quelque chose à la question ; mais les soldats, comme les matelots, cèdent ordinairement à l’influence qu’exercent sur eux ceux que les autorités supérieures leur ont donnés pour commandants.

— Sans contredit, et c’est ce qui doit être. — Nous avons lieu de croire que dix à quinze capitaines de marine sont déjà bien intentionnés à notre égard, et qu’ils conduiront leurs bâtiments respectifs au point qui leur sera indiqué, dès qu’ils seront assurés d’avoir un bon commandant quand ils seront réunis. En nous concertant à propos, nous pouvons commander la mer du Nord, et maintenir ouvertes des communications importantes avec le continent. On sait que le ministère a dessein d’employer autant de troupes allemandes qu’on pourra lever, et une force navale sera essentielle pour tenir à une certaine distance ces étrangers à moustaches. La querelle est entièrement anglaise, Monsieur, et elle doit être décidée par les Anglais seuls.

— Sur ce point, je pense entièrement comme vous, sir Reginald, répondit Bluewater respirant plus librement. Je croiserais tout un hiver dans la mer du Nord pour retenir les Allemands chez eux et laisser aux Anglais le soin de décider qui doit être roi d’Angleterre. Suivant moi, une intervention étrangère, dans une affaire semblable, est le plus grand des maux après une rébellion contre un prince légitime.

— Vos sentiments sont exactement les miens, mon cher Monsieur, et j’espère, vous voir les mettre en pratique. — Mais à propos, comment se fait-il que vous soyez resté seul ici, et de quelle manière l’autorité se partage-t-elle entre deux amiraux qui servent ensemble sur la même flotte ?

— Je ne sais pas trop si je comprends bien votre question. — Je suis resté ici pour partir le dernier à bord du César, et sir Gervais conduit l’avant-garde à bord du Plantagenet pour former une ligne en travers de la Manche afin d’empêcher le comte de Vervillin d’avancer à l’ouest.

— À l’ouest ! répéta le baronnet avec un sourire ironique que l’obscurité empêcha son compagnon de remarquer. — L’amiral Oakes