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commandant d’une escadre, c’est de maintenir ses bâtiments en ordre serré, par un temps de brume et de vapeurs. Cependant il avait donné ordre à un sloop et à une frégate de lever l’ancre et de s’avancer en mer à une lieue ou deux, aussitôt que le brouillard s’était dissipé, afin d’avoir un horizon aussi étendu qu’il était possible. Pour se maintenir à cette distance, par un vent léger et une forte marée, ces deux bâtiments avaient jeté l’ancre l’un à la distance d’une lieue de l’escadre, l’autre à environ deux milles plus loin et plus à l’est. Le sloop était le plus près du bâtiment que l’on venait d’apercevoir, et il avait à la tête de son grand mât un signal que la frégate répétait, et transmettait au vaisseau amiral. Bluewater connaissait si bien tous les signaux ordinaires, qu’il était rare qu’il eût besoin de recourir à son livre de signaux pour en connaître la signification, et il vit sur-le-champ que le premier signal indiquait le numéro de l’Actif. Cependant le sloop fit ensuite d’autres signaux que le contre-amiral ne put expliquer sans aide, et de tout cela il conclut que ce cutter apportait des nouvelles importantes, qu’on ne pouvait comprendre sans recourir au livre des signaux particuliers.

Pendant ce temps, la voiture qui devait conduire mistress Dutton et sa fille à Wychecombe-Hall était arrivée. Elles sortirent de leur maison ; Bluewater s’avança vers elles, en reçut un accueil aussi agréable que lorsqu’il les avait quittées la nuit précédente, et elles ne furent nullement fâchées d’apprendre qu’il allait les accompagner chez sir Wycherly.

— Je crains que l’invitation qu’il nous a fait faire d’aller le voir ne soit pas de bon augure, dit mistress Dutton. — Il faut que quelque, chose de sérieux lui pèse sur le cœur, pour qu’il désire nous revoir si promptement ; et le messager qui a apporté sa lettre m’a dit qu’il n’était pas mieux.

— Nous saurons tout, ma chère dame, quand nous serons arrivés chez lui, répondit Bluewater, et plus tôt nous y arriverons, plus tôt nos doutes seront éclaircis. Mais, avant de monter en voiture, permettez-moi de vous présenter mon jeune ami, lord Geoffrey Cleveland, que j’ai pris la liberté d’inviter à nous accompagner.

Le jeune et beau midshipman fut parfaitement reçu, quoique mistress Dutton eût été trop accoutumée, dans sa jeunesse, à voir des personnes d’un haut rang pour montrer à un jeune lord un respect servile comme son mari. Les dames prirent, suivant l’usage, les deux places du fond de la voiture, et les deux hommes, celles du devant. Cet arrangement plaça Mildred et le midshipman en face l’un de l’autre ; circonstance qui fixa bientôt l’attention du contre-amiral