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— Vous savez, Geoffrey, que je ne suis pas commandant en chef. Sir Gervais a seul le droit d’accorder un congé.

— Cela est très-vrai ; mais tout ce que vous demandez à sir Gervais, il vous l’accorde toujours, et surtout quand cela concerne votre propre vaisseau.

— Vous avez peut-être raison ; mais nous sommes dans un moment de crise, et nous pouvons recevoir l’ordre de mettre à la voile sans avoir plus d’une heure pour nous y préparer. Ignorez vous que le prince Charles-Édouard a débarqué en Écosse, et que les jacobites sont en insurrection ? Si la France le soutient, nous pouvons avoir de la besogne dans la Manche.

— En ce cas, il faut que ma mère se passe de recevoir un baiser de son fils d’ici à un an, s’écria le jeune homme plein de bravoure, en passant furtivement une main sur ses yeux, en dépit de sa résolution. Il faut que le trône de la vieille Angleterre soit soutenu, quand même tous les midshipmen de ce royaume devraient passer des années sans voir ni mère ni sœur.

— C’est parler noblement, lord Geoffrey, et je ferai connaître vos sentiments à qui de droit. Votre famille est whig, et vous ferez bien, à votre âge, de suivre les principes politiques de votre famille.

— Une courte excursion à terre, amiral, serait un grand, plaisir, après six mois passés sur mer.

— Il faut que vous en demandiez la permission au capitaine Stowel. Vous savez que je n’interviens jamais dans la discipline intérieure du César.

— Je le sais, amiral ; mais il y a tant de midshipmen sur ce bord, et ils ont tous une si grande envie d’aller à terre ! — Puis-je dire au capitaine Stowel que vous m’avez permis de lui demander la permission d’aller à terre ?

— Vous le pouvez ; mais Stowel sait qu’il peut faire ce que bon lui semble.

— Ce serait un singulier capitaine, s’il ne le savait pas. — Je vous remercie, amiral Bluewater, — je vais écrire à ma mère, et je sais qu’elle se contentera de la raison que je lui donnerai pour ne pas aller la voir. — Adieu, amiral.

— Bonjour. Et quand le jeune homme ouvrit la porte pour sortir, Bluewater lui dit :

— Milord !

— Avez-vous autre chose à me dire, amiral ?

— Quand vous écrirez la duchesse, présentez-lui mes amitiés respectueuses. Nous nous voyions presque tous les jours quand nous