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un malheur ; un homme qui paraît certainement avoir toutes les qualités nécessaires pour rendre une femme heureuse ?

Frances s’était soulagée en manifestant ses sentiments, et, faisant un effort sur elle-même, elle s’arma d’assez de résolution pour aller joindre la compagnie. Pendant ce temps, et pour distraire les parties de l’espèce d’embarras occasionné par ce délai, l’aumônier avait fait diverses questions au futur époux, et notamment une à laquelle il n’avait pas obtenu une réponse satisfaisante. Wellmere avait été obligé d’avouer qu’il n’avait pas songé à se pourvoir d’un anneau nuptial. L’aumônier déclara qu’il ne pouvait sans cela procéder à la cérémonie, et en appela à M. Wharton pour confirmer cette décision. Le père répondit affirmativement, comme il aurait répondu négativement si la question lui eût été faite de manière à amener un pareil résultat. Le départ de son fils avait été un coup qui lui avait fait perdre le peu d’énergie qu’il possédait, et il avait appuyé de son approbation la remarque du chapelain aussi facilement qu’il avait donné son consentement au mariage précipité de sa fille avec le colonel anglais.

Ce fut en ce moment que miss Peyton rentra dans le salon, accompagnée de Frances. Sitgreaves, qui était près de la porte, lui offrit la main, et la conduisit à un fauteuil.

— Madame, lui dit-il, il paraît que les circonstances n’ont pas permis au colonel Wellmere de se pourvoir de toutes les décorations que l’antiquité, l’usage et les canons de l’Église rendent indispensables pour la célébration d’un mariage.

Miss Peyton jeta les yeux sur le colonel qui était sur les épines, et ne voyant pas qu’il manquât rien à sa toilette, en prenant en considération les circonstances du temps et la promptitude avec laquelle le mariage avait été convenu, elle se retourna vers le docteur avec un air de surprise qui exigeait une explication.

Sitgreaves comprit ce qu’elle désirait, et se disposa à la satisfaire.

— Une opinion assez générale, lui dit-il, est que le cœur est situé dans la partie gauche du corps humain, et qu’il existe une connexion plus intime entre les membres placés de ce côté et ce qu’on peut appeler le siège de la vie qu’entre les organes situés sur la droite, erreur causée par l’ignorance de l’arrangement scientifique des parties constituantes de la machine humaine. Par suite de cette opinion, on pense que le quatrième doigt de la main gauche contient une vertu qui n’appartient à aucun autre, et c’est